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madame de pompadour

partie entre Schlestadt et Landau, — mais lui était-il défendu de chercher à substituer aux dispositions du traité de Versailles quelque plan d’opération mieux approprié aux besoins de la cause commune ? Évidemment, non, pensait le Maréchal de Belle-Isle, en exposant aux yeux troublés de la coterie régnante « l’inutilité d’envoyer en Bohême un corps de 24, 000 hommes qui serait destiné à se perdre sans profit dans les rangs de l’Armée Autrichienne ». « L’Angleterre nous avait déclaré la guerre, — poursuivait-il avec un vif souci de l’honneur national, — à nous de relever le gant en expédiant toutes nos forces sur le Bas-Rhin, afin d’agir contre le Hanovre, si la neutralité demandée par l’Impératrice-Reine à l’Électeur-Roi était refusée, et dans le cas contraire, de marcher sur Magdebourg, si le Roi de Prusse s’obstinait à continuer la guerre contre l’Autriche[1]. »

Tenir ce fier langage, c’était singulièrement élargir l’objectif que s’était tracé les auteurs du traité de Versailles dans leur attachement au maintien de la paix continentale, et cependant, le Conseil Royal, profondément secoué par les dangers qui menaçaient les États de l’Impératrice-Reine, n’hésita pas un instant à se rendre à l’opinion du Maréchal de Belle-Isle. Une conversation s’imposait dès lors avec la Cour de Vienne : d’ordre militaire, ce fut à un Lieutenant Général, le Comte d’Estrées, que l’on confia la mission d’aller faire reconnaître ces tables à la Souveraine, le Roi s’engageait à porter à 30, 000 hommes le secoursqu’il Lui avait assuré, à la condition qu’ils ne seraient plus dirigés sur la Bohême, mais bien sur la Wetteravie, de manière à se joindre à l’Armée Autrichienne ou à l’Armée du Bas-Rhin, selon que l’exigeraient les circonstances. De longues discussions séparèrent pendant plusieurs semaines les négociateurs : à première vue, la Cour de Vienne parut accueillir favorablement l’envoi des 30, 000 hommes entre la Lahn et le Main, c’est-à-dire sur les possessions d’une partie des Princes de l’Empire ses alliés ; mais, à la réflexion, bien des motifs de défiance contre la politique française, et notamment le projet du Roi d’employer ses principales forces contre le Hanovre, lui rendaient fort aléatoire le secours direct qu’Elle attendait de

  1. M. Camille Rousset. Le Comte de Gisors, Paris, 1868.