Page:Revue de l'histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, année 1919.djvu/239

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
226
augusta holmès.

nous serions assez tenté d’en suggérer un nous-même, entre le portrait de Vigny enfant dans sa baignoire, donné par M. Maurice Allem[1], et celui tout à fait inédit d’Augusta Holmès à l’âge de trois mois, que possède la Bibliothèque de Versailles[2].

Quelques années après la naissance de l’enfant, les Holmès vinrent se fixer à Versailles, en cette vieille maison de la rue de l’Orangerie qui porte encore aujourd’hui le numéro 15 et qui fut témoin sinon des premiers ébats de l’enfant, au moins des premières manifestations de la précoce artiste[3].

Dès l’âge le plus tendre, elle unit à une intelligence très vive un caractère difficile qu’exaspéraient, loin d’en venir à bous, les sanctions violents.

« Baby, — écrivait d’elle Mme Deutz, dont M. Séché a recueilli les souvenirs, — à la suite de scènes orageuses entre sa mère et elle, était presque toujours pâle avec des yeux rouges : l’aspect d’un petit lutin malicieux. »

Elle avait des espiègleries damnables, mais, d’ordinaire, une gaîté originale, une vive imagination qui, d’année en année, faisaient d’elle un être plus attachant.

  1. A. de Vigny, p. 17.
  2. L’on ne saurait tirer de ces ressemblances des arguments probants pour soutenir la thèse de paternité de Vigny. Je me suis laissé dire qque Gabriel Monod n’en doutait pas, et M. F. Baldensperger, sans avoir d’opinion ferme sur la question, a bien voulu m’écrire que le profil d’Augusta, la seule fois qu’il la vit dans un concert, lui resta présent comme « assez parent » de celui de Vigny.
    D’autre part, Mlle Marie Huet, amie de la musicienne, consultée par moi, m’a fait l’honneur de me répondre qu’Augusta Holmès, tout en étant très fière du parrainage de l’illustre poète, nia toujours énergiquement qu’il fût son père. Était-ce réellement le fond de sa pensée ou ne repoussait-elle cette idée que par égard pour la mémoire de ses parents légitimes ? C’est ce qu’il est difficile de pénétrer. En tout cas, le fait qu’à un journaliste qui l’interviewait à ce sujet quelques années avant sa mort, elle ait répondu par la négative, en le priant de démentir ce qu’elle considérait comme une légende, ne saurait suffire à nous convaincre. Et adhuc sub judice lis est.
  3. Je me suis laissé dire, il est vrai, par M. Canu, qui prétendait tenir le renseignement de Mlle Pommier, couturière d’Augusta, que les Holmès auraient d’abord habité au no 18 de l’actuelle rue du Peintre-Lebrun (alors rue des Bons-Enfants) un immeuble qui avait été successivement la maison de ville de Mme de Maintenon et le logement des officiers de la comtesse de Provence. Les registres de recensement de la ville de Versailles, conservés aux Arch. Mun., ne font aucune mention de ce premier domicile. Ils m’ont, en revanche, permis d’établir la date exacte où les Holmès vinrent occuper le no 15 de la rue de l’Orangerie : c’est en 1855 qu’il est fait d’eux pour la première fois mention à cette adresse. Cette date est-elle celle de leur établissement à Versailles ? C’est ce que je ne suis pas en mesure d’établir d’une façon certaine. Ils paraissaient avoir en tout cas, conservé un pied-à-terre à Paris, rue des Écuries-d’Artois, où, comme on le verra plus loin, devait mourir Mme Holmès, en 1858.