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madame de pompadour

pour le pays d’Aunis. L’expédition de Mahon est sûre ; les entreprises, les dispositions du Ministre sont admirables. De mauvais citoyens débitent que tout manque, cela n’est pas ; on devrait pendre ces gens-là. Il ne faut pas mettre bas les armes avant d’avoir écrasé les Anglais. La principale chose, n’est-ce pas ? que doit rechercher une grande Puissance, c’est l’honneur. Il vaut mieux périr tous que de laisser porter atteinte à celui de la France[1] ! » Sans doute, notre Marine était vaillante et bien commandée, puisqu’elle concourut de la manière la plus efficace et la plus brillante au succès de l’expédition ; mais, quoi qu’en dise Madame de Pompadour, — et, à la vérité, Machault avait agi de son mieux depuis le peu de temps qu’il en dirigeait l’administration pour rendre quelque force à nos flottes, — il s’en faut cependant de beaucoup que la besogne ait été réellement facilitée à Richelieu. Dans l’île, après le débarquement des troupes, les charrois et les chevaux nécessaires au transport des munitions et des services de l’artillerie, la paille même indispensable aux hommes et aux bêtes ne sont guère faciles à trouver, et en attendant que le Maréchal en reçoive de France, c’est par des moyens de fortune qu’il doit suppléer à la disette de toutes choses. En cette occurrence, Richelieu se révèle organisateur actif, éclairé, habile à pourvoir aux nécessités absentes : sans trève ni repos, qu’il s’agisse d’ouvrir des mines sous ce rocher opiniâtre à la sape ou d’enlever, comme aux dures journées de juin, les défenses extérieures de la place après plusieurs semaines d’efforts violents, il a l’œil à tous les détails du siège, à tous les points de l’attaque.

Rarement, — ressort-il des documents que nous avons consultés, — rarement, au cours de ses campagnes, le Maréchal ne paraît avoir été mieux inspiré et mieux servi qu’à l’expédition de Minorque. Tous, sous sa vigoureuse impulsion, — officiers généraux, chefs de corps et de régiments, gradés et soldats, — rivalisèrent d’intrépidité à s’emparer, dans la journée du 27 juin, d’une place réputée imprenable et dont la reddition, suivant de près la défaite d’une flotte Anglaise accourue à la rescousse[2], entraîna bientôt la conquête définitive de l’île.

  1. M. P. de Nolhac.
  2. 20 Mai 1756. Dispersion de la flotte anglaise à la hauteur de Palma (île de Majorque). Dépôt de la Guerre. Archives historiques.