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madame de pompadour

nous présentera-t-elle des occasions plus heureuses pour ne pas achever de tout perdre en abandonnant nos alliés si vilainement. C’est à la paix qu’il faudra faire des retranchements sur toutes sortes de dépenses et principalement aux déprédations de la Marine et de la Guerre, ce qui est impossible au milieu d’une guerre comme celle-ci. Contentons-nous de diminuer les abus et d’empêcher les trop grandes dépenses, sans aller tout bouleverser comme cela sera indispensable à la paix. Je consens à regret que vous remettiez les Affaires Étrangères entre les mains du Duc de C…, que je pense être le seul en ce moment qui y soit propre, ne voulant absolument pas changer le système que j’ai adopté, ni même qu’on m’en parle. Écrivez-lui que j’ai accepté votre proposition, qu’il en prévienne l’Impératrice et qu’il voye avec cette Princesse la personne qui lui serait le plus agréable pour le remplacer soit dans le premier, soit dans le second ordre[1]… » Cette lettre donnait satisfaction au premier des vœux formés par Bernis ; sur un point, elle torturait son esprit, car, s’il comptait bien garder sa place au Conseil, alors que le Roi ne lui en touchait mot, rien ne le confirmait dans cet espoir. Par une singulière coïncidence, il avait reçu de Rome, le jour même où lui parvenait la réponse du Roi à son mémoire, l’avis de son élévation au cardinalat (ordre des diacres), après une longue délibération entre le Saint-Siège et les Cours Catholiques, dans laquelle l’Impératrice avait adhéré à sa présentation, sur les instances de Choiseul[1], moyennant la promesse qu’il continuerait, quoi qu’il arrivât, à remplir sa charge de Secrétaire d’État aux Affaires Étrangères. Or, les incidents auxquels nous assistons s’opposaient à tout retour en arrière, et Bernis se trouvait fort à l’aise à cet égard pour écrire à Choiseul, en lui transmettant les ordres du Roi : « Vous pouvez vous assurer LL. MM. II. que vous et moi serons au Conseil les plus fermes appuis de l’alliance, qui n’en a pas besoin auprès du Roi, mais qui ne sera efficacement protégée que par une meilleure direction dans les affaires[2]. » Bernis

  1. a et b Mémoires de Bernis.
  2. Important succès pour la France qui, étant assez faiblement représentée au Sacré Collège, n’y exerçait aucune influence. À ce propos, Bernis rapporte dans ses Mémoires que le Roi ni personne n’avait songé à lui faire obtenir cette dignité. L’initiative en revient à Benoît xiv qui, quelque temps avant sa mort (5 mai 1758), avait manifesté l’intention de la lui conférer en reconnaissance de