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madame de pompadour

de nos forces de la Manche et de l’Océan, et pressait le Duc de Nivernois, qu’une maladie fortuite — admettons-le volontiers — retenait encore à Paris, de se mettre en route pour son ambassade.

D’esprit libéral et spéculatif, acquis aux doctrines philosophiques qui tendaient à la réformation de notre état social et politique, membre de l’Académie Française, le Duc de Nivernois joignait à une culture aussi variée qu’étendue une aménité de caractère et de formes qui lui avait attiré la sympathie générale et un juste renom de distinction en France et dans les Cours étrangères. Tout en étant le beau-frère de Maurepas et fréquentant beaucoup à Pontchartrain, il entretenait d’assez intimes relations avec Madame de Pompadour, sans cependant posséder sa confiance ; le silence s’était dressé entre elle et lui lors des négociations engagées avec l’Impératrice-Reine ; peut-être même, en ignorait-il l’existence — c’est un point qui demande à être éclairci — en apprenant, à son arrivée tardive à Berlin, que le traité avait été signé quatre jours auparavant, le 16 janvier, à Windsor, entre la Prusse et l’Angleterre. C’était la réponse de George ii pour persuader à l’Ambassadeur extraordinaire que son traité n’était qu’un acte de précaution contre ses voisins et que le Roi n’avait aucun souci à en tirer, — la guerre allait devenir continentale, de maritime qu’aurait souhaité de la maintenir l’abbé de Bernis. Sans doute, elle n’a été déclarée à aucun moment entre la France et la Prusse ; Frédéric ne nous faussait pas moins compagnie ; à la veille de l’échéance de notre traité d’alliance, il repoussait l’offre qu’on venait lui faire d’en préparer le renouvellement et se liait par un accord solennel avec l’Angleterre, notre ennemie. Malgré tout, on ne voulait pas se brouiller avec la Prusse, et, si inquiétante que fût l’attitude de Frédéric — car on se rappelait qu’il avait usé du même procédé envers nous dans la guerre précédente, — le Marquis de Valori fut invité à reprendre, au mois d’avril, dès le retour du Duc de Nivernois, la fonction de son ambassade auprès de lui. Par contre, il n’y avait plus matière à négociation avec l’Angleterre, et, las d’attendre les réparations qu’il avait exigées de George ii, le Roi se détermina à confier au Maréchal Richelieu, sans engagement, à la vérité,