Paris et se dirigeant vers le nord-est[1]. La ville est sillonnée de Prussiens à pied et à cheval. Comme je rentrais chez moi, un régiment, musique en tête, arrivait sur la place d’Armes par l’avenue de Sceaux. Nous avons été panser nos blessés ce soir. Rien de nouveau ; on parle toujours d’armistice. Un de nos blessés est mort aujourd’hui.
En revenant de panser nos blessés, j’ai entendu proclamer dans les rues qu’il fallait porter à la Mairie toutes les armes à feu, fusils de guerre ou de chasse, pistolets, revolvers, et que ceux qui seraient trouvés détenteurs d’une de ces armes seraient emmenés en Prusse et condamnés à rester quinze ans renfermés dans une forteresse, même après la paix. On dit que cette nouvelle mesure vexatoire a lieu parce que le roi de Prusse va venir habiter Trianon et que l’on craint quelque mauvais coup de la part des Français. Ce matin, le prince royal de Prusse a passé une revue dans la cour du Château et a distribué des décorations aux troupes. Le défilé a eu lieu devant la statue de Louis xiv ! Le prince de Wurtemberg, qui loge chez Grosseuvre, hôtel des Réservoirs, a reçu deux blessures à la tête, hier, du côté de Saint-Cloud. On dit que c’est un franc-tireur qui l’a blessé ; c’est sans doute une des raisons qui fait prendre toutes les armes à feu….. Il circule dans la ville une foule de nouvelles, toujours au désavantage des Prussiens ; malheureusement, on ne sait rien de positif. On vient de terminer à la Mairie le dépouillement des bulletins de l’élection des conseillers municipaux. La liste de l’Union libérale et démocratique a passé tout entière. Dans les circonstances actuelles, c’était inévitable !…..
En revenant de panser nos blessés, je suis allé au Comité international des secours pour chercher ma carte de membres ; là, j’ai appris que la ville de Strasbourg avait capitulé. Un de nos pauvres blessés est mort aujourd’hui. L’élection de nos
- ↑ C’était la Ville de Florence, montée par Gabriel Mengin et Lutz ; ce ballon, parti du boulevard d’Italie à 11 heures du matin, atterrit à 2 h. 30 du soir, dans le bois de Vernouillet, près de Triel (Seine-et-Oise).