LES SOUVENIRS DE M. J.-A. LE ROI
Conservateur de la Bibliothèque de Versailles
PENDANT LA GUERRE DE 1870
Au cours de recherches sur l’histoire de la Bibliothèque de Versailles, un document d’un intérêt particulier a heureusement revu le jour : le recueil même des notes prises quotidiennement par M. Le Roi pendant les mois de septembre, octobre, novembre et décembre 1870.
Ce que Versailles et la Bibliothèque doivent à cet homme distingué, on le sait assez. Le nom de l’auteur des Rues de Versailles est familier à tous ceux qu’intéresse l’histoire de notre ville ; aucun non plus ne peut ignorer le bel article consacré à sa mémoire par M. Taphanel[1], dont la délicatesse d’esprit et le goût littéraire se retrouvent tout entiers dans ces pages charmantes ; le fond n’en est pas moins solide : M. Taphanel avait, dans sa jeunesse, beaucoup connu M. Le Roi, dont il devait être un des plus brillants successeurs, et son témoignage est de première main. On se contentera donc d’y renvoyer le lecteur curieux, en ne donnant ici que les indications nécessaires à l’intelligence du texte.
M. Le Roi, né en 1797, était en 1870 déjà fort vieux ; tout conspirait alors à lui faire plus vivement sentir les douleurs de la guerre : une santé usée par toute une vie de labeur, le souci d’une lourde responsabilité, enfin, des deuils qui l’avaient cruellement atteint. Il lui restait une fille bien aimée et de petits-enfants ; il dut, à l’approche de l’ennemi, s’en séparer, avec la crainte secrète de ne plus les revoir.
Mais ni l’âge, ni les malheurs privés n’expliquent seuls à quel point les désastres de la patrie purent angoisser ce cœur excellent. À l’aube de sa longue vie, M. Le Roi avait déjà vu la
- ↑ Versailles Illustré, 6e année, no 63 (juin 1902), pp. 31-34 ; 4 ill. dans le texte.