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LE MAITRE DES HEURES DU MARECHAL DE BOUCICAUT 25 Musée Britannique a appartenu à Etienne Chevalier, le fameux trésorier de France, pour qui Jean Fouquet a peint les célèbres pages de Chantilly. Le ms. latin 10538 de la Bibliothèque nationale, à Paris, est entré dans la bibliothèque des ducs de Bourgogne au temps de Jean sans Peur ou dans les premières années du gouvernement de Philippe le Bon 1. Le ms. Eger- ton 1070 a passé parles mains du bon roi René, qui l'a fait approprier à son usage, tandis que le volume du musée Condé a appartenu, au XVI e siècle, à la maison de Guise, ce qui lui vaut même d'être désigné aujourd'hui sous l'appellation d'Heures dites de François de Guise. Ces livres d'Heures, du moins ceux dont on n'a pas retranché postérieu- rement le calendrier placé en tête de volume, présentent une particularité à peu près constante. Ils sont presque tous à l'usage du diocèse de Paris. Leur origine parisienne est confirmée par l'examen des détails, tels que l'écriture, la disposition du texte, l'ornementation, le cycle des sujets traités dans les images, etc. Si l'on additionne ensemble les miniatures qui les illustrent, on arrive à un total imposant de morceaux de peinture achevés avec un très grand soin. On peut donc conclure que, pour avoir enluminé autant de volumes faits à Paris, notre maître a dû forcément passer dans la capitale de la France une grande partie de son existence. Il y a aussi une conclusion à tirer du manque, dans ces livres d'Heures, de marques individuelles de provenance originaire. Cette conclusion, c'est que notre maître, tout en ayant été quelquefois employé par tels princes ou tels personnages déterminés, a très vraisemblablement été surtout, comme le fait est arrivé maintes fois, un artiste indépendant, un chef d'ate- lier, ayant son officine à Paris et travaillant pour gagner sa vie, sans savoir d'avance quels clients lui prendraient ses ouvrages. Mais si notre maître des Heures de Boucicaut a beaucoup séjourné à Paris, il paraît bien qu'il ne s'y est pas cantonné exclusivement. Le fait résulte d'une découverte que j'ai faite dans un dépôt de livres très peu connu, la bibliothèque particulière des souverains d'Italie, qui est installée à Turin, au rez-de-chaussée du Palais Royal 2. Là, j'ai rencontré encore 1. Le volume a été complété, à cette époque, par l'addition de quelques miniatures, dues à des mains flamandes, qu'accompagnent les armoiries de Bourgogne. Celles-ci sont d'un type ancien, que Philippe le Bon a modifié au cours de son existence. 2. Cette bibliothèque est tout à fait distincte de celle dont l'incendie récent, à Turin, a profondé- ment ému le monde de l'érudition. LA REVUE DE L' ART. — xx. 4