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198 LA REVUE DE L'ART tableaux se vendaient plus cher que ceux d'aucun autre, les princes se les disputaient ; quand les États cherchaient un présent à offrir à un roi, c'est à leurs oeuvres qu'on pensait ; et pas un voyageur de goût ne tra- versait leur ville sans visiter, comme fit en 1663 M. de Monconys, les ateliers de Mieris, de Slingelandt, de ce Dou « incomparable pour la délicatesse de son pinceau», et sans aller admirer le fameux cabinet de M. de Bye, lequel ne possédait pas moins de vingt-neuf peintures du maître. Tous ces artistes sont aujourd'hui bien décrics ; nous sourions en lisant que Dou tenait' un parasol ouvert au:dessus de son chevalet pour se protéger des poussières flottantes ; et nous sommes près de hausser les épaules en apprenant de Sandrart le nombre de jours qu'il mettait à peindre un balai « à peu près de la grandeur de l'ongle». Nous avons d'autres goûts. Une si grande conscience est impuissante à nous fléchir. La moindre émotion vraie ferait mieux notre affaire. Pourtant, ne sommes- nous pas trop sévères ? J'abandonne les tableaux de sa dernière manière, comme la Jeune mère, envoyé à Leyde par le duc de Westminster, et telle peinture de ses élèves, comme le Cordonnier de Slingelandt, prêté par le musée de Schwerin, bien décousu et d'un désagréable aspect de porcelaine. Mais tout n'est pas de cette qualité. Dou avait été trois ans l'élève de Rembrandt ; à défaut de ce qu'il était incapable de comprendre, il prit de lui un sentiment très délicat de la lumière dans les intérieurs : et plusieurs années se passèrent avant que son amour déplorable pour le détail le gâtât tout à fait. Et saurions-nous vraiment regarder avec une complète indifférence ces pièces claires aux murs blanchis, où il installe tantôt Rembrandt, tantôt la mère de Rembrandt, ou un autre de leurs modèles familiers? Ces. peintures de jeunesse — nous reproduisons l'une d'elles qui figure à Amsterdam — toutes pleines du souvenir de son maître, rappellent avec vivacité les débuts du plus grand peintre de la Hollande; nous croyons les revoir, lui, son ami Lievens et Dou, occupés tout le jour, dans une chambre pareille, à étudier attentivement la nature, tâchant à pénétrer ses secrets... Il serait injuste aussi de méconnaître les élèves de celui que tout un siècle nomma.«le célèbre M. Dou». Slingelandt a ses bons jours. Frans Mieris le vieux (le jeune est intolérable) s'il aime trop la minutie n'en a pas moins peint d'excellents tableaux : sa Dame au clavecin du musée de