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174 LA REVUE DE L'ART le char « de fin or bruny » dans lequel Catherine de Bourgogne, mariée à Léopold d'Autriche, fit son entrée dans ses nouveaux États ; puis il s'établit à son compte, et plusieurs jeunes gens venus du dehors prirent des leçons chez lui, rue des Forges, entre autres Michel Bercherel,d'Angers,qui déclare vouloir apprendre en quatre ans « le métier de paintre et les appartenances d'icellui( ». Arnoul Picornet a été au service de Jean de Vienne, seigneur de Pagny ; il a couvert des tables d'autel de vingt pieds et demi de long sur cinq mètres et demi de haut ; il a travaillé à la Chartreuse ; surtout, il fut le peintre-décorateur des châteaux de Germolles et d'Argilly. A la chapelle d'Argilly, il figura d'or et d'azur « les douze apôtres..., ensemble les tabernacles d'iceux et les reprinses derrier chacun, plus une grande bannière armoyée des armes de mondit Seigneur et de Madame la Duchesse 2 ». Au château de Germolles, il peignit la fameuse salle des Brebis et la chambre de Marguerite de Flandre. Cent quatre-vingts brebis furent mises aux limandes de la première, et, sur les murs de l'autre, la devise en caractères d'or : y me tarde, avec des chardons et trois cents P et M blanches. Le compte de la dépense faite à cette occasion est inté- ressant, parce qu'il montre de quelle manière, étrange pour nous, étaient payés les artistes qui travaillaient aux pièces. Picornet reçoit cinq francs par cent de brebis, deux francs et demi par demi-cent de chardons, douze francs pour ses marguerites, et cinq francs pour avoir peint en plus cent vingt-cinq roses 3. II Lorsque nous pensons aux maîtres de la peinture moderne, nous ne nous les représentons pas dans les occupations qui viennent d'être énu- mérées et qui sont plutôt réservées de nos jours aux artisans. Le peintre est pour nous un artiste, travaillant à figurer sur toile, sur bois ou sur plâtre, des sujets déterminés, portraits, paysages, scènes historiques; et, en ce sens, notre conception de l'art est moins complète que celle du XIVe ou du XVe siècle, et du moyen âge tout entier : elle en isole les parties, au 1. Archives départementales de la Côte-d'Or, B. 11330. 2. Archives départementales de la Côte-d'Or, 13. 4431. 3. Archives départementales de la Côte-d'Or, B. 4434.