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100 LA REVUE DE L'ART l'exemple des préraphaélites, les moindres détails avec une scrupuleuse exac- titude ; et telle est la puissance de la foi, de la bonne volonté, qu'à leur insu ces modestes étudiants devinrent des maîtres et des maîtres originaux. Le plus grand est Cornélius (1783-1867). Jamais homme ne fut plus sérieux, plus sincère, au sens que Carlyle attache à ces mots. Idéaliste dans l'âme, il voulut synthétiser tous les idéals. Malgré quelques rémi- niscences classiques, ses premières oeuvres, le Faust et les Niebelungen, célèbrent l'idéalisme romantique et purement allemand ; encore peu sûr de ses moyens, il choisit comme moyen technique la gravure. Puis l'idéal chrétien l'inspire, et nous avons l ' Histoire de Joseph, de la- maison Bar- tholdy ; Cornélius et ses amis s'y essaient à la fresque, et leurs fresques rappellent par leur délicatesse, leur minutie, la première Renaissance italienne. Se tournant vers l'idéal classique, Cornélius peint, dans la Glyptothèque de Munich, les principaux épisodes de l'Iliade; le style plus franc, les tons plus pâles s'y rapprochent de ce qu'il croit le style de la peinture grecque. Pour la première fois, le succès a fait du penseur un homme populaire. Aussi bien dans l'Allemagne entière, la passion de l'art a-t-elle remplacé la passion de la littérature qui dominait au XVIIIe siècle ; on restaure les anciens monuments ; on construit des églises et des palais dans les styles les plus divers ; on les décore de fresques immenses, et c'est chez tous une ardeur d'apôtres. Cornélius représente, dans la Pina- cothèque de Munich. l ' Histoire de la Peinture, qui est pour lui l'histoire même de l'humanité, et, comme modèle, il se propose la Bible de Raphaël, le grand éclectique. Mais cette période de fièvre touche à son terme, l'humanité ne peut vivre dans l'idéal : l'Allemagne sort de son rêve, et Cornélius, qui voit l'échec de sa prédication, commence à douter de son art même, il comprend les défauts de sa technique; sa dernière oeuvre, l'Apocalypse, reflète sa propre mélancolie; le Campo Santo de Berlin, auquel l'Apocalypse est destinée, n'est pas construit et Cornélius meurt sans avoir exécuté les fresques pour lesquelles il a composé d'admirables cartons. Si Cornélius est le véritable fondateur de l'école idéaliste, son inspira- tion était toute personnelle. D'autres imprimèrent à l'école ses tendances durables. Les Nazaréens se consacrèrent à la peinture religieuse. Overbeck