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et apportent leur récolte à l’usine centrale pour le travail, plus difficile et plus coûteux de la fabrication. C’est, en quelque sorte, le diminutif du système des usines centrales pratiqué depuis peu dans quelques-unes de nos colonies, mais seulement sur une grande échelle, et entre cultivateurs de race blanche. Outre l’avantage que procure dans toutes les industries la division bien ordonnée du travail, le colonage partiaire organisé pour les hommes de couleur et pour la race noire, relève la condition du travailleur, inspire à l’affranchi des idées d’ordre et de prévoyance, et prépare plus efficacement que l’atelier à l’exercice ultérieur de la liberté. L’atelier demeurera le premier degré de l’affranchissement, le colonage partiaire deviendra le second, et promettra de beaux bénéfices aux plus intelligents comme aux plus laborieux. C’est le moyen de créer aux colonies une sorte de classe bourgeoise, intermédiaire entre le riche planteur et le journalier. Bien que la division de la société en diverses classes soit contraire aux idées républicaines, expression souvent mal traduite de notre civilisation avancée, cette division s’impose nécessairement dans un pays où une race longtemps esclave et considérée comme inférieure, ne saurait s’élever du premier coup au niveau de la race qui l’a tenue directement sous le joug. La liberté, dans l’histoire des sociétés humaines, a toujours précédé l’égalité, si toutefois cette dernière peut jamais être parfaite dans l’application. Nous aurons fait beaucoup si nous parvenons à créer aux colonies cette classe intermédiaire qui formera la transition, et comme le trait d’union des deux races. La production, d’autre part, y gagnera assurément, et, dans l’étude de l’émancipation, nous ne devons jamais négliger ce point de vue.

Le colonage partiaire a déjà été essayé à Maurice, et récemment à la Martinique. Il ne s’agit plus que de le développer. Les colons se prêteront à de nombreuses concessions de terrains, du moment qu’ils seront assurés d’en recevoir les produits.