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solution intéresse à un degré presque égal les colonies et la métropole.

Émancipons les noirs, mais ne ruinons pas les blancs. On a dit dans un autre temps : « Périssent les colonies, plutôt qu’un principe ». Disons aujourd’hui : « Consacrons le principe, et conservons les colonies ».


Nous avons exposé impartialement les principes généraux qui doivent, selon nous, guider le gouvernement dans le grand acte de l’émancipation. Ces principes se résument en trois mots :

Justice pour les noirs ;
Équité pour les colons ;
Intérêt national.

Il nous reste maintenant à proposer les mesures qui nous paraissent être l’expression la plus exacte de ces principes, et à présenter l’ensemble des lois et des institutions destinées à assurer définitivement la liberté des noirs, tout en ménageant les autres intérêts.

L’exemple de l’Angleterre est sous nos yeux, nous lui ferons de nombreux emprunts, et nous profiterons de l’expérience. Si, pendant l’immortelle révolution de 1789, nous avons eu les premiers l’honneur de protester en faveur de la liberté humaine, sans distinction de couleur ni de races, l’Angleterre, nous devons le reconnaître, a devancé les autres nations dans l’application sérieuse de ce grand principe. Elle a cédé, disons-le hautement, non pas à de misérables calculs inspirés par des combinaisons commerciales, mais aux purs sentiments de la philanthropie ; et, s’il faut ici, comme dans la plupart des choses humaines, mesurer la générosité de l’œuvre et le mérite du bienfait en raison de la somme d’argent déboursée, l’émancipation a coûté à l’Angleterre 7 à 800 millions de francs, plus, la ruine ou tout au moins la décadence de ses plus belles colonies d’Amérique. Le gouvernement britannique, abordant le premier l’abolition de l’esclavage, a commis de graves erreurs ; il convient de faire un choix intelligent parmi ses mesures pour atteindre à moins de frais le même résultat.