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Un passant voit un homme en attaquer un autre dans la rue : au lieu de s’opposer à çette attaque comme il le devrait, il continue son chemin, ou bien, s’il intervient, il se contente de régulariser l’attaque et d’amoindrir la spoliation, comme Colbert avec le code noir. Difficilement on voudrait donner à ce tort négatif le nom de complicité et de participation, et cependant l’indemnité ne saurait être légitimement accordée qu’à cette condition.

En 1815, la traite a été formellement et solennellement abolie. Elle a été déclarée délit et crime par la loi ; des pénalités rigoureuses ont été prononcées contre les introducteurs d’esclaves dans les colonies.

Si, jusque-là, la qu|estion de complicité de la mère patrie peut sembler douteuse, à dater de cette époque le nuage s’éclaircit et fait place à une évidence manifeste. Tous les esclaves introduits depuis 1845 contrairement aux lois et tous les descendants de ces esclaves se trouvent, relativement à la France, en dehors de cette condition de complicité. Il ne resta plus aux colons, même un prétexte pour leurs réclamations.

Les partisans de l’esclavage exaltent volontiers la douceur de ce régime pour les esclaves eux-mêmes. Ils oublient d’énoncer quelle était la loi de la mortalité parmi les esclaves. Cette mortalité autrefois était si excessive, que la race noire se perpétuait, seulement dans une proportion minime, par la reproduction, et qu’un recrutement énergique, au moyen de la traite, était indispensable pour en maintenir le niveau dans les colonies.

C’est ainsi qu’en faisant un relevé impartial de l’état originaire des esclaves dans nos îles, on verra que le nombre de ceux qui remontent directement par eux-mêmes ou par leurs parents au-delà de 1815 ne forme qu’une très-faible minorité dans la population.

En droit, la réclamation d'une indemnité à fournir par la mère-patrie est donc inacceptable. Mais la fraternité, la charité, la libéralité est non seulement permise, elle est encore prescrite aux nations comme aux individus. Encore bien que le sol doive rester aux co-