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Général ou spécial, un tarif est proportionnel quand il repose sur une base kilométrique constante, par exemple si l’on paie 5c. par kilomètre quelle que soit la distance parcourue. Un tarif est différentiel quand il repose, au contraire, sur une base kilométrique décroissante à mesure que la distance parcourue augmente, par exemple si l’on paie 5 c. par kilomètre pour les distances inférieures ou égales à 100 kilomètres, 4 c. pour les distances comprises entre 100 et 200 kilomètres, et ainsi de suite. Ici, il est clair que la compagnie vend le service du transport kilométrique à deux prix différents suivant qu’on lui demande plus ou moins d’unités : elle fait sur une échelle beaucoup plus étendue, beaucoup plus compliquée et beaucoup plus grave ; ce que fait le commerçant au détail qui donne le treizième à la douzaine. Deux exemples suffiront à donner une idée de la souplesse et de l’importance de ce mécanisme. D’après le rapport présenté par M. Moussette à la commission d’enquête de 1862, les prix moyens de transport de la houille par tonne et par kilomètre, frais de chargement et de déchargement non compris, avaient été, en 1860, sur les cinq compagnies françaises du Nord, de l’Ouest, de l’Est, d’Orléans et de Lyon, de 9 c., 8 c. 10, 7 c. 60, 6 c. 90, 6 c. 20, 4 c. 90, 4 c. 70 et 4c. 20 pour les distances respectives de 6, 19, 32, 58, 80, 120, 161 et 241 kilomètres. Les prix de transport du minerai de fer étaient, en 1862, sur le Great Northern anglais, de 31 c., 13 c., 9 c., 6 c. 5, 5 c. 6, 5c. 5, 5 c. 2 pour les distances respectives de 6, 20, 50, 100, 161, 200 et 300 kilomètres.

Ces tarifs différentiels, et ceux de transit qui ont des effets analogues, sont un sujet de discussion des plus vives. On leur a énergiquement objecté le trouble qu’ils apportaient dans la situation des villes industrielles et commerçantes, en les éloignant ou les rapprochant à volonté de certains centres de production ou de consommation des matières premières ou des objets manufacturés, et l’on a agité la question de savoir si les compagnies ont ou non le droit de modifier ainsi les conditions naturelles d’industrie ou de commerce des villes, et si l’État a ou non le devoir d’intervenir pour maintenir ces conditions. On leur a fait une autre objection relative à l’intérêt des canaux, et l’on s’est aussi demandé si les compagnies avaient ou non le droit de tuer les canaux,