vous parle en leur nom. Nous sommes chez nous. Cette salle est à nous. Et vous ?
— Mais.. mais c’est une assemblée.
— Parfaitement.
— Qui s’occupait des élévateurs.
— Qui peut s’occuper de tout ce qu’elle veut, dans les limites des lois, une assemblée qui, sans votre intervention, allait même être aspergée d’eau bénite, ce qui du reste va très mal à une réunion d’hommes fâchés…
Un rire homérique souleva la salle :
— Bravo, Avramaki !
— Depuis quand la police se permet-elle de troubler une réunion de gens paisibles ? Et quoi ? Sommes-nous en état de siège ? Non ! Alors ? Ne savez-vous pas que la Constitution du pays, base de toutes les lois, nous donne le droit de nous réunir et de discuter paisiblement, sans vous demander aucune autorisation ? Et ignorez-vous que, en ce moment, par votre présence ici, vous commettez un acte illégal, vous foulez aux pieds une des dispositions les plus sacrées de la Constitution ? Aussi, monsieur le commissaire, je vous invite, au nom de ces deux mille hommes, à quitter immédiatement ces lieux et ne plus y revenir que nanti d’un mandat dûment signé par un juge d’instruction. Pouvez-vous nous montrer un tel mandat ? Non ! Eh bien, voici la porte, monsieur le commissaire !
La salle était déchaînée tandis que le policier s’en allait :
— Bravo ! bravo, Avramaki ! Parle-nous des élévateurs, nom de Dieu.
Le cordonnier se dressa, souriant :
— Maintenant que le policier et le pope sont partis, la moitié de l’État bourgeois-capitaliste est chassée de cette salle et nous pouvons parler de tout.
Avramaki fit d’abord une longue digression à propos de l’incident avec la police et expliqua aux hommes les droits et libertés que la Constitution octroie à tout le peuple roumain. Il appuya ses dires de citations de certains articles de la loi fondamentale, qu’il lut dans une brochure dont il s’était muni.
— Vous voyez, — conclut-il, — nos lois son bonnes, mais