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le désert, terre stérile qui n’a pas besoin de culture, parce que la culture ne la fertiliserait pas, que l’on possède sans rivaux, parce qu’elle ne mérite pas d’être disputée.

Depuis huit jours, j’ai eu plusieurs tentations de suicide, et les devoirs de la famille m’ont paru insupportables. Enfants, enfants, vous êtes des tyrans, vous nous forcez à vivre.

Mais je viens de voir lever la lune. Pourquoi fuis-tu la solitude, Piffoël ? Tu n’as commis aucune faute et tu vois bien qu’un instant de solitude te guérit. Tu vois bien que ton cœur est bon et que ta conscience t’en rend témoignage. Pourquoi tant souffrir ? Parce que ceux qui te font souffrir souffrent plus que toi ! Pauvre docteur, toi seul sais combien tu es bête, et ceux dont tu pleures la souffrance ne pleurent que la leur propre.

Oui, tout bien considéré, je crois que je n’ai encore rencontré rien d’aussi bêtement bon que moi. J’ai bien le droit de le dire, ayant un caractère si brutal, si emporté, si violent, si grondeur.

Certes, Docteur, tu ne cherches pas à en imposer aux autres, tu ne te fardes pas et si tu es fier de la bonté qui réside au fond de tes entrailles, on ne peut te reprocher d’en être vain ; tu n’en fais pas parade et il faut te bien connaître pour s’en douter…

Beaux astres, c’est moi qui suis ce petit point de ce petit monde, moi, pauvre atome plein d’amour pour vous, plein de foi en vous. À chaque heure de la nuit je salue votre gloire, votre premier rayon lorsque, sortant des vapeurs de votre horizon, vous apparaissez à l’orient dans vos robes d’or. C’est moi qui suis votre course rapide lorsque vous vous abaissez sur l’autre hémisphère et fuyez mélancoliquement, brillants comme des yeux pleins de larmes vers d’autres ténèbres, où peut-être n’avez-vous pas un seul adorateur aussi fervent que moi !


25 juin.

Pauvre petite misérable fauvette, grosse comme une mouche, pesante comme une plume, tombée de ton nid hier soir avant que tes ailes soient poussées, et déjà installée sur mon doigt, dans mes cheveux, béquetant ma main et venant à moi quand