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UNE CONSPIRATION EN 1537

le plus beau cheval que Naples ait jamais fait courir dans ses fêtes, la plus belle haquenée de toutes les Espagnes, des étoffes d’or et des voiles brodés de Constantinople… Tu rêves et ne me réponds point ?

LORENZO

Je cherche un moyen. Si je pouvais l’éloigner un instant de sa mère, la femme est toujours femme, et la vertu s’amollit devant les richesses comme la cire devant le feu.

LE DUC, détachant sa bourse de sa ceinture.

Tiens, prends cet or pour commencer et dis-lui de demander la fortune de vingt familles. Mais hâte-toi !

LORENZO

J’obéis ! Mais il faut que Votre Altesse évite les yeux clairvoyants de ma mère. Si elle concevait le moindre soupçon, la petite serait jetée dans un couvent ou envoyée aux Strozzi. Dans deux heures, je serai au Palais et j’espère porter à Votre Altesse une réponse favorable.

LE DUC

Je compte sur toi ! Compte sur la récompense.

LORENZO, seul.

Oui, compte sur moi ! Je jure par le ciel et par l’enfer, par le sein de ma mère et par la damnation éternelle que tu me trouveras aujourd’hui. Toi-même as marqué ton heure. Ô mon bien-aimé maître, je te remercie !




Scène III


Quatre heures. — La chambre de Lorenzo.


SCORONCONCOLO, LORENZO.


SCORONCONCOLO

Maître, as-tu assez du jeu ?

LORENZO

Non ! Je veux qu’on nous entende longtemps aujourd’hui. Crie plus fort.

SCORONCONCOLO

Au secours ! Trahison ! Lorenzo du diable !

LORENZO

Ferme, allons ! Frappe du pied ! Tiens, fais comme moi ! (Il trépigne avec violence et crie d’une voix étouffée.) Traître ! meurtrier ! Tu m’as assassiné ! Je meurs !