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LA REVUE DE PARIS

BINDO, troublé.

En effet, Votre Altesse doit croire que mon neveu…

LE DUC

Fort bien. Nous sommes contents de voir un allié de notre maison faire les premiers pas vers nous, et nous le prions d’accepter la direction de notre prochaine mission à notre royal beau-père, l’empereur Charles V.

BINDO, s’incline profondément.

C’est un honneur dont je sens tout le prix et Votre Altesse peut compter sur ma fidélité.

LE DUC

Il suffit. Quant à vous, Messere Capponi, nous savons que votre influence est grande. Nous vous engageons à la faire servir à notre profit. Ce sera aussi le vôtre. Car nous vous offrons, si vous y parvenez, l’exemption de toute contribution présente et future, pour vous et toute votre famille.

[CAPPONI[1]]

Ah ! Messire prince, c’est trop de bontés ! Vous êtes… Votre Seigneurie est un grand prince.

LE DUC

Tous ceux que j’ai enrichis me l’ont dit. Que ma présence ici ne vous retienne pas plus longtemps.

CAPPONI

Oh ! nous resterons avec plaisir.

LORENZO, à Capponi.

Cela signifie qu’il est temps de vous retirer.

(Bindo entraîne Capponi et le force à s’incliner à plusieurs reprises, ce dont il s’acquitte fort gauchement.)

LE DUC, à ses écuyers qui gardent les issues.

Laissez passer ces deux personnes[2].

(Lorenzo le suit des yeux avec préoccupation.)

LE DUC

Voyez ce marchand grossier et ce noble perfide, l’un cupide, l’autre vain ! Quelle odeur de trahison, quelle puanteur de peuple ils ont laissées ici ! Ouvre les fenêtres, Renzo ; je crois toujours sentir ce plébéien m’envoyer son haleine à la figure, tout en me jetant son vous à la tête !

LORENZO

Votre Altesse veut-elle voir les lettres que j’ai reçues du dehors ?

LE DUC

Volontiers. Dis-moi, cet infernal Strozzi ?

  1. George Sand a par erreur attribué cette réplique à Bindo.
  2. Cf. Musset, Lorenzaccio, acte II, sc. iv :
    LE DUC, à ses gardes.

    Qu’on laisse passer ces deux personnes.