Page:Revue de Paris - 1921 - tome 3.djvu/746

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
742
LA REVUE DE PARIS

— Vous en êtes un autre, — répliqua Pemberton.

— Non, je ne suis pas un héros, mais d’un autre côté je ne suis pas un bébé. Je ne veux plus supporter cela. Il faut que vous trouviez un emploi qui vous rapporte de l’argent. J’ai honte, j’ai honte ! — continua-t-il d’une voix tremblante à laquelle la passion donnait ce timbre d’argent des petits enfants de chœur qui lancent leurs notes aiguës dans l’immensité d’une cathédrale.

Son ami fut profondément remué.

— Nous devrions nous en aller vivre ensemble quelque part, — dit-il.

— Je ne ferai qu’un bond, si vous voulez de moi.

— Je me procurerais du travail, de quoi nous faire vivre tous les deux, — continua Pemberton.

— Et moi aussi. Pourquoi ne travaillerais-je pas ? Je ne suis pas tellement propre à rien !

— L’ennui c’est que vos parents ne voudront jamais en entendre parler. Jamais ils ne se sépareront de vous ; ils baisent la trace de vos pas. N’en voyez-vous pas la preuve ? Ils ne me détestent pas ; ils ne me veulent pas de mal ; ils sont très aimables pour moi. Mais ils sont toujours prêts à m’exposer pour vous à n’importe quel embarras.

Le silence avec lequel Morgan accueillit ses affectueux sophismes parut à Pemberton assez expressif. Au bout d’un instant l’enfant répéta :

— Vous êtes un héros !

Puis il ajouta :

— Ils m’abandonnent complètement à vous. Vous avez toute la responsabilité. Ils me laissent sur vos bras du matin au soir. Pourquoi s’opposeraient-ils à ce que je vive entièrement avec vous ? Je vous aiderais.

— Ils ne tiennent pas énormément à ce que je sois aidé et ils sont ravis de penser que vous leur appartenez. Ils sont extraordinairement fiers de vous.

— Moi je ne suis pas fier d’eux. Mais vous le savez.

— En dehors du petit travers dont nous venons de parler, ce sont des gens charmants, — dit Pemberton sans relever cet appel fait à sa compréhension.

Il était néanmoins vivement frappé de celle dont l’enfant