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LE LIVRE DES MORTS

Comme armes offensives, cette momie habitée par les dieux avait les formules gravées sur les murs ou les parois du sarcophage : on en disposait les lignes de telle sorte que les yeux du défunt étaient censés pouvoir lire commodément. Quand sous le nouvel empire thébain (vers 1 500 av. J.-C.) les cercueils, en s’adaptant exactement aux contours de la momie, prirent la forme « anthropoïde », le décorateur ne trouva plus assez de place pour écrire les versets rituels : on glissa sous le cartonnage ou dans les bandelettes un rouleau de papyrus contenant l’édition plus ou moins complète des textes qui composent le « Livre des Morts ».

Au cours des siècles, le contenu des éditions a varié comme leur disposition extérieure. Le premier recueil, celui des Pyramides, comprend quatre cent cinquante-trois chapitres, dont quelques-uns seulement sont encore transcrits à l’époque thébaine, tandis que, des textes nouveaux fournis par les cercueils, beaucoup n’ont eu qu’une vogue éphémère et ne se retrouvent pas sur les papyrus. Vers le temps des Psamétiques (600 av. J.-C.) les Égyptiens ont compris la nécessité d’ordonner cette matière sacrée : d’où un choix de cent soixante-cinq chapitres, auquel se sont tenus désormais les copistes. Le meilleur exemplaire est un papyrus long de vingt mètres conservé au musée de Turin et publié par Lepsius. Les chapitres s’y succèdent en lignes verticales, avec des titres soigneusement distingués à l’encre rouge ; une série de vignettes délicatement enlevées au trait sert de titres courants et commente le texte des formules.

Un pareil Livre était indispensable à tout mort soucieux d’atteindre la vie future ; aussi trouvait-on toujours chez les entrepreneurs de funérailles, des exemplaires complets ou abrégés, avec ou sans vignettes, mais prêts à servir ; le nom du propriétaire, qu’il fallait prononcer à chaque chapitre, était laissé en blanc : on le transcrivait après l’achat. La plupart de ces éditions vulgaires sont fort incorrectes et témoignent que le copiste ne comprenait rien à ces formules très anciennes. Le style est en effet chargé d’allusions à des faits mythiques, de noms inconnus ou de figures dont la signification veut tout un commentaire. Les théologiens de l’époque thébaine étaient