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LA REVUE DE PARIS

depuis longtemps du droit : pour sauver l’humanité, il lui faudrait six mois de dictature, le renversement radical de tout ce qui existe, pour fonder sur des ruines. Son but alors comme toujours était le triomphe violent d’une partie de la nation sur la nation tout entière : son moyen, les souffrances horribles du temps présent, les maux du passé, les promesses d’un avenir dont il semblait répondre. Il donnait à croire que lui seul compatissait aux maux des classes ouvrières : il faisait du cœur un monopole dont il s’adjugeait le bénéfice. À l’entendre, lui seul avait souffert, lui seul avait été froissé : il arrivait à se faire de ses douleurs, fausses ou réelles, un droit au pouvoir.

Il s’était formé et organisé d’une façon puissante dans les sociétés secrètes. Ses théories s’étaient affermies dans l’ombre, alors que la lumière eût fait s’évanouir tout ce qu’il y avait en elles de chimérique et d’insensé. Chose étrange ! Ces hommes, qui parlaient sans cesse des misères de l’ouvrier qui travaille de ses mains, n’étaient pas de ces victimes du travail manuel. Aux journées de Février, on les vit allant de groupe en groupe fomentant les haines et attisant les passions. On les retrouva au 17 mars et au 16 avril, mains blanches qui n’avaient jamais touché l’outil, déclassés du travail de l’esprit qui ont tous les vices de la foule, sans en avoir ni la naïveté féconde ni les fortes vertus.

C’était la plus petite fraction, et la fraction mauvaise, de ce grand parti qui marchait à la réforme sociale par des théories aussi diverses que contraires, mais dont le point de départ était vrai : les maux intolérables d’une classe nombreuse, le but légitime et profondément humain : le soulagement de toutes les misères.

La question était tout entière dans ce fait de la situation douloureuse de la plus grande partie du pays. Le socialisme prétendait arriver à donner à tous leur part du bonheur terrestre. Criminel en ne l’accueillant pas, s’il pouvait réaliser ses promesses, le gouvernement ne l’était pas moins en lui confiant la dictature, si sa doctrine n’était qu’impuissance et ses promesses que mensonges.

Mais le socialisme qui était presque une religion présentait le spectacle le plus désolant que puisse offrir une doctrine. C’était l’anarchie personnifiée, une Babel où l’on n’eût pas