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LA REVUE DE PARIS

tance ; une salve ou deux mirent en fuite tous ceux qui ne restèrent pas sur le terrain.

Donc, le 3 septembre, les Marocains engagèrent toutes leurs forces ; de notre côté, cinq compagnies et deux sections d’artillerie ne quittèrent pas leurs tentes et il restait encore pour la défense de la ville des détachements du génie et du train, et cinq cents Espagnols. On peut conclure qu’au moins un bataillon de plus eût pu, sans inconvénient, être employé à renforcer les troupes de sortie. Du moment qu’on recherchait un combat aussi sérieux que possible, ne fallait-il pas mettre en ligne tous les hommes dont ou pouvait disposer ?

Et si l’on passe à la discussion de la tactique employée sur le champ de bataille même, il y a lieu de remarquer d’abord que dans les trois sorties, à aucun moment et sur aucun point, l’offensive n’a été prise par nous : on ne peut citer que deux exceptions : l’attaque d’une compagnie de tirailleurs qui mit baïonnette au canon, le 1er septembre, pour s’emparer d’un enclos en pierres sèches, voisin de la ferme Alvarez, dans lequel on ne trouva qu’un cheval blessé ; et le mouvement du capitaine Dérigoin, que j’ai décrit plus haut, et dont la portée ne dépassa pas 2 ou 300 mètres.

Dans une des nouvelles qu’il a consacrées aux exploits de l’armée des Indes, Rudyard Kipling dit : « Un Afghan qui attaque et un Afghan qui est attaqué sont deux hommes très différents. » Cette observation s’applique à tous les peuples, si braves soient-ils, dont les guerriers ne possèdent pas d’organisation militaire et ignorent la discipline du rang. Elle est particulièrement vraie pour les Arabes ; on l’a toujours constaté dans les guerres passées, et le corps de débarquement de Casablanca devait bientôt s’en rendre compte en ne trouvant presque aucune résistance lorsqu’il prendrait l’offensive contre les campements de Taddert et de Sidi-Brahim.

On pourrait objecter que d’importantes victoires européennes furent remportées dans l’Afrique du Nord par l’emploi exclusif de la défensive, notamment les batailles des Pyramides et d’Omdourmân. Mais dans toutes ces affaires les procédés de combat des Arabes étaient fort différents de ce qu’ils sont aujourd’hui. Les Mamelucks de Mourad-Bey et les Ghazis du Khalifa se lançaient sur les carrés en foule confuse, que le feu