mensongère, annonçant quelques concessions libérales, toute la ville fut aux pieds du Tsar, dans un transport d’allégresse et de gratitude ; pendant vingt-quatre heures, toute la Pologne fut acquise au parti de l’entente !
Suspendu l’une et l’autre fois, dès le premier accroc, l’essai du régime autonome n’a jamais d’ailleurs été complet jusqu’ici ni véritablement sérieux. On ne saurait traiter un peuple, en pareille matière, comme nous faisons d’un enfant en lui retirant le jouet, dont il aura manqué de reconnaître, du premier coup, l’emploi ou le charme. L’histoire ne connaît guère d’exemple d’un régime nouveau, si bienfaisant fût-il, qui se soit imposé d’emblée, sans résistance et sans secousse ; quand le bénéficiaire est un peuple portant en lui un idéal, auquel son cœur demeure attaché, alors même que la raison lui en commande le sacrifice, quelques révoltes sont inévitables. Les vaincre est légitime ; s’en prévaloir pour interrompre un essai de conciliation et de pacification est absurde.
Dans les tentatives précédentes, le gouvernement russe s’était d’avance enlevé toute chance de succès, en se bornant à une action extérieure. Pour imposer sa loi au peuple élu, bien qu’il parlât du haut du mont Sinaï, Iahvé lui-même n’a pas dédaigné le concours de Moïse, et, plus près de nous, une expérience rivale a, même en territoire polonais, affirmé la valeur et fourni la formule d’une méthode plus rationnelle. Avant de devenir, grâce au régime autonomique, une sorte d’Eldorado polonais, la Galicie autrichienne demeurait, elle aussi, un foyer d’insurrection. L’installation de ce régime n’a pas été opérée sans encombre, et les premiers ouvriers de l’œuvre, les Ziemialkowski et les Goluchowski, ont partagé les disgrâces populaires du marquis Wielopolski. Ils en ont triomphé, parce que, soutenus dans leur tâche par un gouvernement fidèle à la méthode adoptée, ils ont pu s’appuyer sur un parti national, numériquement très faible, mais fortement constitué : dans les provinces polonaises de sa domination, le gouvernement russe pourrait trouver sans peine les éléments d’une coopération analogue.
Plus embarrassante apparaît, en Russie comme en Pologne, l’entente sur un programme défini. L’autonomie est un mot compréhensif et par là même dépourvu de toute précision. Il