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un mouvement de réaction donna lieu à l’avènement d’un parti nouveau. Offensé et douloureusement meurtri, le sentiment national saisit la première occasion qui s’offrait pour exprimer ses révoltes intimes. Un anniversaire historique universellement respecté — celui du 3 mai, date de la Constitution libérale de 1791 — amena, dans les rues de Varsovie, une manifestation imposante, où l’élément socialiste et révolutionnaire se trouva noyé dans un débordement de l’exaltation patriotique. Le lendemain, le nouveau parti national-démocratique était créé, groupant tous les éléments réfractaires à la propagande internationale et s’adressant aux sentiments religieux pour rallier les masses populaires dans ce pays de foi profonde ; sous la présidence de quelques grands seigneurs, il groupait la petite noblesse et la haute bourgeoisie. En dépit de quelques divisions ultérieures et de quelques défections, c’est lui qui, dans les dix gouvernements russes du Royaume de Pologne et dans quelques autres provinces de l’ancienne République, a victorieusement présidé aux élections et fait entrer ses candidats à la Douma.

Au début, il a paru, toutefois, inféodé aux idées et aux principes d’un chauvinisme intransigeant, qui, une fois de plus, semblait exclure toute solution pratique du redoutable problème. Sous les aigles polonaises déployées par les manifestants du 3 mai, l’éternelle chimère d’une indépendance absolue revivait encore et entraînait les nationaux-démocrates de 1905 dans l’ornière des insurrectionnels de 1831 et de 1863. C’est à ce moment que deux événements ont fait entrer la Pologne et la Russie elle-même dans une voie entièrement nouvelle.

Réuni à Moscou, en septembre 1905, le premier congrès des ziémstvos appelait dans son sein des délégués polonais. Une loi qui demeure en vigueur excluait les provinces polonaises de toute organisation autonome : elles n’avaient aucun droit à être représentées dans cette réunion. Le congrès passa outre. Il fit mieux. Son premier vote fut pour réclamer une réforme constitutionnelle, applicable à tous les sujets de l’empire ; le second, recueillant la même unanimité et donnant lieu à des manifestations chaleureuses, fut pour affirmer, au profit de la Pologne, l’existence de droits natio-