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plus spécialement du problème polonais, parce que le public russe lui-même l’a eu surtout en vue et qu’il est aussi le plus compréhensif et le plus délicat.


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Naguère encore, un gouvernement, champion attitré des nationalités slaves contre le germanisme, interdisait l’usage de la langue polonaise dans un pays où, à la même heure, un gouvernement allemand laissait créer deux universités de cette langue et présidait à la fondation d’une académie. Violemment russifiés, les sujets polonais du Tsar restent privés de la plupart des droits civils ou politiques acquis à la majorité des Russes. Une situation en résultait qui paraissait, il y a un an encore, absolument sans issue. Le gouvernement russe trouvait en Pologne deux partis politiques, diamétralement opposés, mais également incapables de concourir à une solution satisfaisante.

L’un, comprenant une élite intellectuelle, en venait à répudier lui-même le nom d’ugodowcy, partisans d’une entente avec la Russie, que ses adversaires lui infligeaient comme un stigmate d’infamie. Il avait rencontré le refus à ses demandes de concessions et à ses essais de compromis ; l’entente qu’il préconisait devenait en effet une dérision. Il avait beau changer d’étiquette et d’organisation : qualifié maintenant de réaliste, son programme semblait toujours porter à faux et demeurer sans objet. Il restait aussi profondément impopulaire.

Recrutant des partisans de plus en plus nombreux au sein de la classe ouvrière et de la petite bourgeoisie, se rattachant à des organisations occultes ou internationales, l’autre parti versait dans le socialisme et arrivait à écarter la question nationale ou à ne lui faire place dans ses combinaisons d’avenir que sous la forme d’une république indépendante. En attendant, il prêchait l’insurrection à main armée, et, faute d’autres moyens pour l’entreprendre, il avait recours aux grèves politiques et aux attentats individuels. Il terrorisait le pays et menaçait de le précipiter dans l’anarchie.

Vers le milieu de l’année 1905, provoqué par ces violences,