Page:Revue de Paris - 1905 - tome 1.djvu/670

Cette page a été validée par deux contributeurs.
666
LA REVUE DE PARIS

Pour vouloir trop obtenir, les Colombiens devaient tout perdre. Les représentants de la province de Panama au Congrès de Colombie avaient déclaré que, si le Congrès se séparait sans ratifier le traité, la province reprendrait son indépendance et conclurait elle-même avec les États-Unis les arrangements nécessaires.

Le 31 octobre 1903, le Congrès colombien se séparait : le 3 novembre, l’indépendance de la République de Panama était proclamée à Panama et à Colon ; au bout de quelques jours, la province entière y faisait adhésion. Le président Roosevelt ordonnait aussitôt aux représentants des États-Unis dans l’isthme de reconnaître le gouvernement nouveau et, le gouvernement colombien ayant manifesté l’intention d’envoyer des troupes contre les révolutionnaires, il l’avisait que les navires américains avaient l’ordre d’empêcher tout débarquement.

M. Roosevelt a été accusé d’avoir, au moins, prêté son appui aux révolutionnaires. Mais le tort que faisait à la province de Panama le rejet du traité, suffit à expliquer la décision de ses principaux citoyens. Quant à M. Roosevelt, les avantages que la formation du jeune État devait procurer à son pays lui dictaient nettement son devoir ; un traité fut conclu par lui dès le 18 novembre avec la république de Panama. Cette fois, les États-Unis voyaient tous leurs désirs réalisés : ils pouvaient désormais, sans recourir à aucun subterfuge, construire « un canal américain en territoire américain ». La république de Panama leur abandonnait, moyennant les avantages pécuniaires antérieurement consentis à la Colombie, tous ses droits de souveraineté sur la zone du canal ; elle les autorisait à élever des fortifications aux deux bouts, et elle s’engageait à leur louer encore, à chaque extrémité, le territoire nécessaire pour établir des stations navales.

Mais il fallait que le Canal pût conduire un jour à des marchés encore exploitables. Partisans intéressés de l’intégrité de la Chine et de la « porte ouverte » en Extrême-Orient, les États-Unis avaient vu avec inquiétude la Russie procéder en Mandchourie, malgré ses dénégations répétées, à une installation provisoire, que tout indiquait comme devant être de fort longue durée. Sous le président Mac Kinley, Washington