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la basse-cour », et M. Saint-Gilles de Baudri d’Asson, et quelquefois M. de Saci. Il y avait à la ferme MM. Fontaine et Lancelot, avec huit enfants, leurs élèves, MM. Hamon, médecin, Antoine Le Maistre, Arnauld de Luzanci, le docteur Antoine Arnauld, M. Deslandres, serrurier de la maison, M. du Bel-Air qui s’occupait des bâtiments, M. d’Éragny de la Rivière, tour à tour garde-bois et cuisinier, et toute une équipe de jardiniers, MM. François Yenkins, gentilhomme anglais, Du Chemin, prêtre, de Pontis ancien capitaine aux gardes, et peut-être M. du Cambout de Pontchâteau, sous les ordres de M. Bouilli, ex-chanoine d’Abbeville.

Le vallon de Port-Royal ne ressemblait plus à ce « désert horrible et sauvage » où M. Antoine Le Maistre et M. de Scricourt s’étaient réfugiés quinze ans plus tôt[1]. En 1637, le « premier et le second ermite » n’avaient trouvé que des bâtiments délabrés, un étang pestilentiel, des marécages hantés par les crapauds et les couleuvres et dont les eaux s’infiltrant dans l’église, couvraient parfois les dalles du chœur. Antoine Le Maistre, nouveau saint Jérôme, qui souhaitait « des cavernes dans la terre où pleurer ses péchés », n’avait pas craint le froid humide, et les fièvres, et le mortel silence de ces ruines. Établi avec M. de Séricourt dans quelques chambres d’infirmerie qui n’avaient guère que les quatre murailles, tous deux s’étaient appliqués aux travaux manuels et aux exercices de la pénitence. En 1644, Port-Royal comptait déjà six ermites. Il y en avait près de vingt-cinq, en 1652, quand les religieuses étaient revenues aux Champs. Les

  1. Antoine Le Maistre, avocat au Parlement et conseiller d’État, résolut de quitter le monde en 1687, à l’âge de vingt-neuf ans. Il s’établit d’abord dans une maison du faubourg Saint-Jacques, près du monastère de Port-Royal de Paris où il avait déjà sa grand’mère, sa mère, cinq tantes et plusieurs cousines, toutes de la famille Arnauld. L’année suivante il alla s’installer avec son frère, M. de Séricourt, dans l’abbaye des Champs, abandonnée en 1625 par les religieuses. Le troisième ermite de Port-Royal fut un garçon cordonnier, nommé Charles de la Croix, mort en 1643. Puis vinrent M. Arnauld de Luzanci, cousin des Le Maistre ; M. Pallu, médecin du comte de Soissons, mort en 1650 ; M. Bascle, M. Arnauld d’Andilly, M. Le Maistre de Saci ; M. Giroust, chanoine de Saint-Nicolas-du-Louvre ; son frère, M. Giroust de Bessi ; M. de la Petilière, MM. Moreau, Deslandres, Du Chêne, maître de philosophie, d’Espinoy de Saint-Ange, Lancelot, du Fossé, Antoine Arnauld, Hamon, etc. Les Messieurs habitèrent d’abord « quelques salles d’infirmerie que les religieuses n’avaient pas ruinées en s’en allant ». En 1648, la mère Angélique envoya aux Champs huit religieuses de chœur avec deux converses, et les Messieurs s’installèrent aux Granges.