— Je n’ai pas les nerfs, je n’ai pas la vigueur qu’il faudrait pour ce que vous désirez.
— Je vous remonterai, moi !
— J’aimerais mieux que vous n’ayez pas à le faire… Je ne voudrais pas compromettre vos projets, vous pensez ; mais cela pourrait arriver… par crainte et par faiblesse.
— Je ne vous le conseille pas ! dit la voix avec une tranquille assurance.
— Ah ! je voudrais être mort !… Il n’y a vraiment pas de justice… Vous devriez pourtant bien admettre… Il me semble que j’ai bien le droit…
— Marchez donc ! »
M. Marvel pressa le pas, et, pour un moment, ils retombèrent dans le silence.
— C’est diablement dur ! déclara Marvel.
N’ayant obtenu aucun succès, il changea ses batteries.
— Qu’est-ce que j’y gagne ? reprit-il sur le ton d’un homme auquel on fait une injustice intolérable.
— Oh ! taisez-vous, — cria la voix avec une force soudaine et surprenante. — Je pourvoirai à vos besoins. Contentez-vous de faire ce qu’on vous dit. Vous pouvez très bien le faire. Vous êtes un imbécile, mais vous ferez très bien cela.
— Je vous dis, monsieur, que je ne suis pas l’homme qu’il vous faut. Je le dis, respectueusement, mais c’est ainsi.
— Si vous ne vous taisez pas, je vais encore vous serrer le poignet ! — dit l’homme invisible. — J’ai besoin de réfléchir.
Bientôt deux carrés de lumière jaune parurent à travers les arbres, et la tour d’un clocher se profila dans l’obscurité.
— J’aurai la main sur votre épaule pendant toute la traversée du village, — dit la voix. — Tâchez de filer droit ; n’essayez pas de faire des bêtises. Le cas échéant, ce serait tant pis pour vous…
— Je sais, soupira Marvel, je sais tout cela.
L’homme à la mine si malheureuse sous son chapeau hors d’usage remonta avec ses paquets toute la rue du petit village et s’enfonça dans la nuit au-delà des dernières fenêtres éclairées.