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L’HOMME INVISIBLE[1]

X

VISITE DE M. THOMAS MARVEL À IPING


Après que la première panique se fut dissipée, Iping se mit à discuter. Le scepticisme tout à coup dressa la tête, un scepticisme un peu inquiet, pas du tout intrépide, scepticisme néanmoins. Rien n’est plus facile que de ne pas croire à un homme invisible. En somme, ceux qui avaient vu notre héros s’évanouir dans l’espace ou qui avaient éprouvé la vigueur de son bras, on pouvait en faire le compte sur les doigts. De ces témoins, M. Wadgers manquait pour l’instant, puisqu’il s’était prudemment mis en sûreté derrière les verrous et les barreaux de sa propre demeure ; Jaffers, lui, était couché, étourdi, dans le salon de l’auberge. Et de grandes idées étranges, qui dépassent l’expérience, ont parfois moins d’effet sur les hommes et les femmes que de petites considérations plus prochaines.

Iping était joyeux et paré. Chacun avait revêtu ses habits de fête. Les réjouissances de ce lundi de Pentecôte étaient attendues depuis un mois et plus. Dans l’après-midi, les gens même qui croyaient à l’homme invisible commencèrent à reprendre leurs petites distractions ou du moins essayèrent d’y revenir, supposant qu’il était définitivement parti. Quant aux sceptiques, toute l’histoire n’était pour eux qu’une farce.

  1. voir la Revue du 1er décembre.