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LE GLANEUR DE MYRRHE


La horde des Djamala appartenait à la grande tribu des Beni-Zinn, dispersée dans la péninsule de Sinaï.

Et sur cette terre incolore et neutre, incertaine, presque une île, un continent presque, isolée entre deux golfes, adhérant à deux déserts, qui ne rappelait ni l’Arabie et l’imposante nudité de ses montagnes, ni l’Égypte et la déprimante mélancolie de ses sables, ses habitants aussi, peuple hasardeux, n’étaient ni fièrement nomades comme les Bédouins de Petra, ni bassement sédentaires comme les Bédouins de Suez.

C’étaient des Bédouins mercenaires : meneurs de caravanes, vendeurs de troupeaux, glaneurs de myrrhe. Ils possédaient des tentes et campaient à l’aventure sous la cruauté des soleils et sous l’enchantement des lunes ; mais ils avaient aussi des gourbis où ils s’abritaient quand le vent froid descendait des hauteurs ébranlant les mâts et tourmentant les toiles.

Ils se disaient maîtres des espaces ; mais leur liberté n’était qu’un leurre, car elle dépendait du gouvernement turc, et le Khédive les maintenait tributaires. Pourtant il leur advenait de se dérober à l’acquittement de cette dîme. Alors les Kaïmacams de Nakel ou d’Akaba leur dépêchaient des soldats