Page:Revue de Paris - 1832 - tome 40.pdf/285

Cette page n’a pas encore été corrigée

jeune, robuste ; un peu plus d’or ne me rendrait pas beaucoup plus content de mon sort que je ne le suis. Vous vous/trompez diablement…… (pardon, ma cousine), vous vous trompez beaucoup si vous croyez que je viens demander l’aumône à mon digne oncle que j’aime de tout mon cœur malgré sa culotte de satin et ses manchettes de dentelle. Je ne l’ai pas cherché, moi; il y a huit jours je ne savais pas seulement qu’il existât. ’arrive’ il me saute au cou’ il m’amène ici, me montre ses richesses, me demande si je serais bien aise de posséder, tout cela; à quoi je répondis toujours affirmativement par forme de politesse. Aujourd’hui vous m’apprenez que vous êtes sa fille : cela change bien les choses. Il ne me reste qu’à me féliciter d’avoir une si jolie parente, à remercier mon oncle de ses bontés pour moi, et à rejoindre mon poste sur le navire Inkle et Yariko, avant que ma personne devienne insupportable.

- Vous semblez douter de notre affection, mon cousin’ dit Jenny toute confuse et tout abattue; c’est une injustice que vous nous faites. n Et connue elle sentait que c’était là un dénouement bien triste à des projets si rians, elle ne put cacher une larme qui tremblait au bord de sa paupière.

‘ Melchior reprit courage. « Cousine, dit-il avec sa manière brusque et franche’ je veux vous prouver que je crois à votre amitié et que j’estime votre cœur. Je vais vous confier un désir qui me pèse, mais dont je ne rougis pas. Vous m’aiderez auprès de mon oncle’ ou plutôt vous vous chargerez de ma demande. Voici : ma mère est une bonne femme ; je n’ai qu’elle à aimer dans le monde ; aussi je l’aime. Elle a élevé, tant qu’elle l’a pu, quatorze enfans, qui tous sont morts sans l’aider. Pour en venir là, il lui a fallu contracter des dettes que dix ans de ma paie ne sauraient éteindre. En attendant, ma mère mourra de faim et de froid. Vous ne savez pas ce que c’est que le froid’ Jenny ; chez nous c’est un mal qui revient tous les ans, et dont les vieillards souffrent particulièrement. Que mon oncle lui assure 600 livres de rentes ; ce sera fort peu de chose pour lui’ et pour moi ce sera un immense service…

Jenny tendit cette fois sa main au marin. « Allons trouver mon père ensemble, lui dit-elle ; je me charge de tout. »

En les voyant arriver d’un air de bonne intelligence, le visage du nabab s’épanouit. En trois mots et d’un air d’autorité enfantine Jenny demanda le capital de 6,000 livres de rentes pour la mère de Melchior.

« J’ai dit 600, objecta le jeune homme.