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et injustes. Il ne faut pas non plus apprécier le moyen-âge d’après les maux que le genre humain a éprouvés pendant ces dix siècles. Une fièvre ardente le consumait : c’était le chaos sur lequel l’esprit de Dieu planait.

Jugez-le par ses résultats. Comptez ces découvertes qui ont agrandi le cercle de nos connaissances. Mesurez ces matériaux entassés par lui pour le bénéfice des nations futures. La liberté politique, à laquelle nous attachons tant d’importance, émane du Wittenagemot, de l’esprit d’association germanique, des droits de la bourgeoisie, de la grande Charte arrachée au roi Jean. Notre industrie doit tout aux inventions que j’ai indiquées plus haut. Les facultés humaines se sont réveillées depuis que la classe moyenne a pris son rang entre les seigneurs et les serfs ; l’esclavage aboli a conduit pas à pas le genre humain vers cette grande doctrine de l’égalité entre les hommes. Long-temps esclaves, les femmes ont pris part aux mouvemens de la société, et jeté dans le monde moral ces germes de délicatesse, d’honneur, de grâce et de bon goût, qui ont donné aux peuples modernes un caractère et des nuances si remarquables par leur romanesque nouveauté.

Tel fut ce moyen-âge, avant-scène bizarre du drame compliqué de la société moderne, époque où devaient se confondre le paganisme mourant et le christianisme à sa naissance ; où les derniers soupirs des sociétés anciennes devaient se mêler aux premiers efforts et aux mouvemens confus d’une nouvelle organisation. Dans l’histoire des progrès de l’espèce humaine, point d’époque plus intéressante ; elle est grande par elle-même, sublime par ses résultats. Nous l’avons montrée, non sous le rapport poétique, mais sous un point de vue positif : nous avons prouvé que les vieilles institutions étaient anéanties, que leur régénération ne pouvait avoir lieu que par une secousse violente. Nous avons indiqué les bienfaits qui du sein de cette convulsion terrible se sont répandus sur l’avenir ; nous avons indiqué ces dix siècles de barbarie comme le berceau de nos institutions, de nos industries et de nos lois.

Pourquoi cette justice n’a-t-elle pas été rendue aux temps dont