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sir la taciturnité anglaise, s’assemblaient pour se regarder en face, et se taire pendant des heures entières. Il faut donc définir simplement le club « une réunion d’hommes, soumise à des règles particulières. » Quel que soit d’ailleurs le lien de cette association, on ytrouve toujours du moins similitude de goûts, communauté d’intérêts ou d’opinions, égalité de fortune ou de caste, etc., etc.

L’institution des clubs remonte au-delà de la première révolution anglaise ; mais jusqu’à la révolution de 1688, c’est-à-dire jusqu’à l’ère des mœurs constitutionnelles, les clubs avaient une concurrence qui n’existe plus guère aujourd’hui : c’était celle des cafés ou maisons à chocolat[1], où il était de bon ton d’aller parler des nouvelles du jour, de la littérature, du théâtre, etc., etc. Quelques-uns de ces cafés étaient déjà des réunions choisies, où l’on n’était pas admis sans un introducteur. Tel fut ce fameux café de Will’, dans la place de Covent-Garden, où Dryden dictait ses oracles sur les auteurs et les acteurs de son temps. Les lecteurs de Walter Scott se rappellent comme le poète des îles de Shetland, Claude Halcro, dans le Pirate, fait sonner haut sa présentation à Dryden, dans ce café littéraire, qui devait avoir quelque analogie avec l’ancien café Procope, à Paris. Les politiques se réunissaient au café de Saint-James, d’où sont datés les premiers numéros du Tatler d’Addison. Les clubs devaient être alors des sociétés intimes, quelques-unes même tout-à-fait secrètes, comme par exemple, le club des Têtes de veau, réunion des anciens partisans du régicide ; qui, dans leur repas annuel du 31 janvier, se faisait servir une tête de veau, allusion cruellement ironique à la tête de Charles Ier.

Lorsque le temps eut converti les guerres des factions en polémique de tribune, chaque parti se divisa en clubs, où les Whigs et les Torys, succédant aux Têtes-rondes et aux Cavaliers des discordes civiles, préludaient autour d’une table aux luttes de la chapelle Saint-Étienne, et préparaient le pamphlet qui devait remuer

  1. Cofee-Houses et Chocolate-Houses. Le premier café fut fondé en 1651, par un Grec, qu’un négociant du Levant avait amené à Londres.