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LES ROMANS DE LA GRENADE[1]



LE FEU


fa come natura face in foco.
dante


I

L’ÉPIPHANIE DU FEU


— Stelio, le cœur ne vous tremble-t-il pas un peu, pour la première fois ? — demanda la Foscarina avec un faible sourire, en touchant la main de l’ami taciturne assis à son côté. — Je vous vois pâle et pensif. Quel beau soir de triomphe, pour un grand poète !

D’un regard, divinement, elle recueillit dans ses yeux experts toute la beauté répandue à travers ce dernier crépuscule de septembre, de telle sorte qu’en leur vivant ciel brun les guirlandes de lumière créées sur l’eau par la rame environnèrent les hauts anges d’or qui resplendissaient au loin sur les campaniles de Saint-Marc et de Saint-Georges-Majeur.

— Comme toujours, — continua-t-elle de sa plus douce voix, — comme toujours, tout vous est favorable. Par un soir comme celui-ci, quelle âme pourrait demeurer close aux

  1. Cette nouvelle série doit se composer de trois romans ; — les deux suivants auront pour titre : La Victoire de l’Homme et Triomphe de la Vie.

    L’auteur du Feu a tenu à honneur de remanier lui-même et de raccorder pour nous certaines pages, presque intraduisibles à cause de leur extrême « italianité ». Ailleurs encore, de-ci de-là, il s’est plu à retoucher quelques détails. Ainsi, par les doubles soins de l’auteur et du traducteur, la Revue est-elle heureuse d’offrir à ses lecteurs une version digne en tous points de leur attente.