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bienveillantes, connu surtout, avec la Fille de Roland, Pour la Couronne ou Cyrano leurs plus persistants triomphes.

La comédie fantaisiste en vers fournit une carrière particulièrement brillante. Dans l’éclat de son manteau d’Arlequin, on reconnaît plusieurs anciennes couleurs. Et d’abord cette volonté de poésie que le vieux théâtre romantique avait manifestée avec les parties bouffonnes de Cromwell et de Marion, le quatrième acte de Ruy Blas, l’À quoi rêvent les jeunes filles de Musset, — ce prestige de l’époque Louis XIII, de sa truculence ante-classique, tournée, par les Grotesques de Gautier, en liberté anti-classique ; — la vogue momentanée de la pantomime, des deux Deburau, qui fournit aux poètes, à Gautier et à Banville, le cortège bientôt monotone des Pierrots ; — la peinture et le décor du XVIIIe siècle, le cadre de la comédie italienne et des tableaux de Watteau, trempés dans le bain du vers romantique, la Fête chez Thérèse qui devient la fête chez Thalie ; — le goût d’un public cultivé, encore tout français, pour les jeux du vers, les trouvailles de la rime, certaine musique gratuite dont les personnages de convention sont le prétexte ; — le vieux métier poétique poussé précisément à sa perfection technique par les Parnassiens, et la corde dorée, dangereuse et précaire, de cette perfection menant volontiers son jeu en liaison avec les ficelles du théâtre ; des acteurs enfin qui savent dire les vers, aiment les dire, les Sarah Bernhardt, les Coquelin, les Mounet, les Bartet, les Berr, les Silvain.

En 1869 il a suffi d’un acte en vers, à l’Odéon, le Passant, dit par Agar en courtisane et Sarah Bernhardt en page, pour faire, comme on écrivait alors, courir tout Paris, porter François Coppée à la gloire, et l’engager dans le théâtre, où il donna une quinzaine de pièces, dont deux très grands succès, Severo Torelli et Pour la Couronne, l’un et l’autre encore à l’Odéon. L’Odéon, plus que la Comédie-Française, fut en effet le théâtre des poètes, avec son public lettré, traditionnel, rive gauche qui n’est pas seulement du côté du cœur, mais du côté de la province. Le Passant déclencha la série de ces « actes odéoniens » où le spectateur moyen prenait en cabine son bain de poésie.

Au terme d’acte odéonien, il faudrait joindre, pour carac-