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— Vous avez un frère ?

Le visage pâle marqua la surprise :

— Un frère ?… Moi ?

— Oui, un frère qui vous ressemble.

— Je suis fils unique.

Il poussa un long soupir. Ses paupières vacillaient. Elles se fermèrent.

— C’est terrifiant ! — fit Herbelle, en passant la main sur sa tempe.

— Ce n’est pas terrifiant, — répliqua l’infirmière, en faisant le signe de la croix. — C’est une réalité supérieure…


Le major venait d’apercevoir les signes de l’aide. Il se dirigea rapidement vers le fond de la baraque. L’autre Givreuse avait encore les yeux ouverts, mais déjà couverts d’un brouillard.

— Vous vous appelez Pierre de Givreuse ? — exclama Herbelle.

Cette question parut réveiller un peu le blessé. Il répondit :

— Oui… Pierre de Givreuse.

— Né à Avranches… en 1889.

— Oui…

— Vous avez un frère ?

Le blessé parut faire un grand effort de pensée, il grommela d’une voix dormante :

— Je n’ai pas de frère… pas de frère !

Ses paupières étaient closes :

— Rappelez vos souvenirs ! — clama Herbelle.

Mais Givreuse ne répondit point.


Une heure plus tard, Herbelle amenait auprès du « premier » Givreuse, deux soldats du ne régiment, atteints de blessures légères.

— Connaissez-vous cet homme ? — demanda-t-il.

— On ne connaît que ça dans ma compagnie ! — répondit un des hommes. — Un pote et un bon. Même qu’y se nomme Givreuse…

Le major se tourna vers l’autre soldat :

— Et vous ?