Page:Revue de Genève, tome 3, 1921.djvu/336

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et tous les soirs, à la même heure,
— Ou bien est-ce seulement en rêve ?
— La forme d’une jeune fille moulée dans de la soie
Apparaît à ma fenêtre.

Et, passant entre les ivrognes,
Toujours seule, sans compagnons,
Fascinante,
Elle vient s’asseoir près de la fenêtre.

Sa robe de soie souple,
Son chapeau aux plumes de deuil,
Sa main étroite chargée de bagues,
Évoquent des légendes anciennes.

Et, stupéfait d’une telle similitude,
Je regarde à travers son voile,
Et je vois un pays enchanté,
Un horizon lointain.

Ma vocation s’éclaire.
Quelqu’un m’a confié son soleil.
Et le vin âpre
Pénètre jusqu’au fond de mon âme.

Et les plumes d’autruche, penchées,
Vacillent dans mon cerveau ;
Et les yeux bleus, très profonds,
Fleurissent dans le pays lointain.

Dans mon âme il y a un trésor
Dont seul j’ai reçu la clef.
— Vraiment, tu es un monstre d’ivresse !
— Je sais : la vérité est dans le vin.


Et voici un autre poème de la même époque :



Ceux qui sont nés dans les années obscures
Ne gardent pas le souvenir de la route parcourue.
Nous, enfants des années terribles de la Russie,