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société désignée par ce vocable du Saint-Sacrement. Il a su qu’on lui attribuait des interventions sournoises soit dans la politique proprement dite, soit dans l’administration de l’Etat, soit dans la vie privée des familles. Il a su les noms de quelques-uns des hommes dont on racontait, à la Cour, qu’ils faisaient partie de la cabale des dévots. Il a su que certains des coups dont il avait eu à souffrir venaient plus ou moins directement de ce cénacle. Il a été porté à croire, comme on le répétait volontiers autour de lui, que tout ce zèle pieux n’était, au fond, que comédie d’ambitieux sans scrupules qui n’hésitaient pas à jouer des choses saintes dans leur intérêt. Et il a dressé de toute la force de son génie — aidé ici par l’indignation — la figure immortelle du personnage qui symbolisera pour toujours le vice stigmatisé par sa pièce.

Mieux informés que lui, nous sommes tenus à faire des distinctions qui lui étaient impossibles. Sans diminuer en rien l’admiration éprouvée devant le type créé par lui et prodigieusement vivant, nous pouvons penser que sa pièce n’est pas le portrait ressemblant de l’authentique confrère du Saint-Sacrement et qu’il serait injuste de s’y tromper.

La Compagnie du Saint-Sacrement n’a pas dû sa naissance à une préoccupation malsaine d’intrigue sournoise. Je confesse volontiers qu’après avoir étudié de près certains de ses actes — un peu trop nombreux — j’ai été enclin moi-même à dénoncer d’une façon trop assidue et constante, dans l’activité de la Compagnie, ce souci d’ambition et de pouvoir. C’est une façon trop simple d’expliquer les événements. Au début, dans sa caractéristique essentielle, la Compagnie ne poursuit qu’un but religieux et n’obéit qu’à une préoccupation de piété. Ce qu’elle poursuit, c’est une forme nouvelle de l’Imitation de Jésus-Christ. Le confrère médite devant le mystère central de la religion catholique. Il est en adoration devant le Saint-Sacrement de l’Autel. Il se répète que, dans cette hostie consacrée, le Christ est tout entier, qu’il y a là l’abaissement suprême du Sauveur devenu invisible sous les espèces les plus grossières et continuant à faire ses miracles, faisant même les plus grands, dans cet état d’abaissement où les sens des