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les malades eux-mêmes d’être à leur aise dans leur maladie, et, quelque désagréables que soient les symptômes dont ils souffrent, de les aimer cependant. « Au fond, j’ai peur d’être guérie, j’aime ma maladie » me disait une jeune fille, victime d’obsessions fort pénibles. Et le Dr Schnyder, de Berne, a publié en 1912 dans les Archives de Psychologie le journal intime d’une jeune hystérique, ignorant complètement les théories freudiennes, et dans lequel elle parle ainsi de sa névrose : « N’est-ce pas un refuge tout indiqué pour quiconque, affaibli, diminué, dominé par le sentiment de son impuissance, se sent hors de combat ? Puisque ce refuge se présente de lui-même à moi, pourquoi ne l’accueillerais-je pas à bras ouverts ? ».

8. La libido : L’instinct sexuel est le mobile fondamental de toutes les manifestations de l’activité psychique. — Voilà, sous sa forme la plus simple, la doctrine fameuse du « pansexualisme », qui a provoqué le grand scandale. Celui-ci eût sans doute été moins vif si l’on n’avait moins souvent ignoré que, pour Freud, la notion de libido dépasse de beaucoup celle de sexualité. J’accorde volontiers que Freud et ses disciples n’ont guère été bien clairs à ce propos ; mais il faut savoir lire entre les lignes, et saisir l’esprit, et non la lettre de la théorie. Libido, cela signifie le plus souvent le désir impétueux, — dont, il est vrai, le désir sexuel est, selon Freud, le type et le premier représentant, dans l’évolution de l’individu — ; c’est ce désir de bonheur, ou de jouissance, cet intérêt pour tout ce qui est de nature à satisfaire nos besoins, que personne ne niera être le principe même de toute notre activité. « Car tous les hommes désirent être heureux, a dit Pascal. Quelques différents moyens qu’ils y emploient, ils tendent tous à ce but. C’est le motif de toutes les actions de tous les hommes, jusqu’à ceux qui se tuent et qui se pendent… Tout ce qui est au monde est concupiscence de la chair, ou concupiscence des yeux, ou orgueil de la vie : libido sentiendi, libido sciendi, libido dominandi ». — Chacun sait d’ailleurs que les moralistes chrétiens ont toujours rapproché les divers modes de la sensualité, et regardé la sensualité génitale comme le type de toute