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démences, ce rapprochement avait été déjà établi jadis. Au XVIIIe siècle, un nosologiste, Sauvage, déclare que la folie est « véritablement le songe de celui qui veille », et bien souvent depuis on a dit que les fous sont des hommes qui rêvent éveillés. Moreau de Tours, en 1855, allait même jusqu’à affirmer qu’ « un seul mot peut exprimer les rapports qui existent entre la pensée-rêve et la pensée-délire ; ce mot, c’est : « identité ». Et Gérard de Nerval définissait le délire « l’épanchement du rêve dans la vie réelle », etc., etc.

Mais tout cela, ce n’étaient que de simples remarques en passant, et Freud est le premier qui ait tiré de ces rapprochements une théorie féconde des troubles mentaux.

7. Le refuge dans la maladie : La névrose a une signification fonctionnelle, dynamique, elle est une manifestation défensive de l’individu qui se réfugie dans la maladie pour échapper aux conflits qu’il ne peut surmonter. — Cette doctrine, qui projette une lumière si vive sur tout le fouillis obscur des psychoses, est peut-être une des parties les plus complètement neuves du système freudien. Et cependant, là encore, l’inédit rappelle du connu : nous trouvons en effet, que cette manière de concevoir les affections mentales s’harmonisa admirablement avec la conception moderne des maladies physiques, regardées aujourd’hui comme des réactions défensives contre une cause nocive (l’inflammation, la fièvre, la purulence etc.). « Flucht in die Krankheit, doctrine profonde qui étend au monde mental cette forte vue de la pathologie que la maladie n’est qu’une manifestation défensive de la vie » a dit Paul Bourget.

On a découvert à ce propos à Freud un ancêtre, qu’il était lui-même loin de soupçonner : Schopenhauer, qui, dans une page curieuse, expose la théorie du refoulement, et explique la maladie mentale comme en étant une conséquence : « C’est dans la résistance de la volonté à laisser parvenir à la lumière de l’intelligence ce qui lui répugne que l’on doit voir la source de la folie. N’est-ce pas là exactement le sens de la conception psychanalytique ?

Un fait, qui me paraît être une éclatante confirmation de cette manière de voir, c’est le sentiment qu’ont parfois