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A moins d’un acte de foi qui ne peut se donner rationnellement) dans l’influence bienfaisante de la démocratie, à moins de croire sans examen que l’Allemagne nouvelle, touchée de la grâce, se convertira à l’idée qu’elle est une grande coupable, une grande pécheresse, qu’elle a mérité son sort et qu’elle expie justement, à moins, pour tout dire, qu’un coup de baguette magique n’ait changé non seulement la nature allemande, mais la nature humaine et la nature des choses, à moins de cela, toutes les vraisemblances (et le devoir de la politique est d’en tenir compte), sont pour que l’Allemagne ressente et ressente de plus en plus comme insupportable le traité du 28 juin. Toutes les vraisemblances sont pour qu’elle prenne à tâche de s’en délivrer et de le détruire, avec les moyens qui peuvent rester à un peuple de 60 millions d’hommes pour briser ses chaînes. Il suffit de se souvenir des sentiments qu’avaient laissés en France les traités de 1815, sentiments qui ont gouverné notre politique intérieure et extérieure depuis la chute de Napoléon Ier jusqu’à l’avènement de Napoléon III.

L’Allemagne actuelle pourrait ne pas protester contre le traité de Versailles, en exécuter les clauses avec bonne volonté et d’un cœur contrit, que notre avis n’en serait pas changé. Cette bonne volonté, cette contrition n’existe pas, mais peu importe. Peu importent les protestations du gouvernement de Berlin et de l’opinion publique. Peu importe encore que ces protestations soient sincères ou qu’elles soient simplement de circonstance. Un peuple vaincu a plus de vingt-quatre heures pour maudire ses juges. Ce que nous examinons, et la seule chose, en vérité, que la politique doive retenir, c’est une situation prise en elle-même. C’est un problème de forces et de mécanique.

Les forces ne sont pas ajustées de telle sorte que les conditions nécessaires à une pacification profonde soient remplies. Celles d’une conciliation entre la France et l’Allemagne ne le sont pas non plus. Les Français ne peuvent pas renoncer à leur créance. Les Allemands jugent le tribut exorbitant et n’en reconnaissent pas le bien-fondé. Où peut être le terrain d’entente ? Il est en outre extrême-