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moitié des droits qu’il possédait sur Bourbonne, cependant le tout, c’est-à-dire tant ce que Renard cédait que ce qu’il se réservait, devait être tenu dans la suite, à perpétuité, en compagnie et par indivis par le roi et ses successeurs et par ce chevalier et ses successeurs ainsi que tout ce qui pouvait venir en accroissement de cette communauté. La justice serait rendue et le gouvernement exercé par des personnes désignées par les deux parties ; en outre, ils contribueraient également aux frais qu’exigeraient l’entretien des fours et des moulins et l’extraction du sel des eaux chaudes de la ville. Les bénéfices qui ressortiraient de toutes ces exploitations se partageraient par moitié entre le roi et le seigneur de Bourbonne. Nous avons donc là un véritable traité de pariage par lequel le roi tenait à l’avenir la maison de Choiseul dans une dépendance plus étroite qu’il n’avait pu le faire jusqu’alors.

L’acte que nous donnons ci-après rectifie aussi une petite erreur que M. Lacordaire a commise dans son étude. Il se demande si la terre du sire de Choiseul n’aurait pas été comme celle de Monthureux-sur-Saône, une terre de surséance, c’est-à-dire dépendant à la fois du comté de Champagne et du comté de Bourgogne. S’appuyant sur ce que dans le contrat de vente qu’il donne, on ne parle en aucune façon du comte de Bourgogne, il conclut, après avoir cherché à expliquer sur quoi pouvaient se fonder des réclamations formulées par Philippe de Poitiers, palatin de Bourgogne et sire de Salins au sujet de cette terre[1], que, « jusqu’à la vente de 1324, la seigneurie de Bourbonne fut et demeura un franc-alleu, ne relevant et ne dépendant de personne. La cession que Regnard de Choiseul en fit librement au roi en est la preuve indiscutable »[2]. Or, dans l’acte donné par le reg. JJ. 66, Renard de Choiseul garantit au roi, envers et contre tous, la vente qu’il lui fait, excepté contre la reine Jeanne, comtesse de Bourgogne, et ses héritiers, « pour cause dou fié dou vendaige dessus dit »[3]. Ainsi, la seigneurie de Bourbonne dépendait donc bien du comté de Bourgogne ; la réserve faite par Renard en est la preuve et par conséquent elle n’était pas un franc-alleu ne relevant et ne dépendant de personne.

  1. Revue de Champagne et de Brie, deuxième sem. pag. 451 et suiv.
  2. Id., 1880, premier sem., pag. 53.
  3. Voir pour tout ce qui concerne Jeanne, épouse de Philippe V le long et ses droits sur le comté de Bourgogne, Revue de Champagne et de Brie, 1879, deuxième sem., pag. 452 et suiv.