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EN FRANCE

§ 1. Subventions de l’État.

Il y a tous les ans au budget de l’État un crédit de 140.000 à 150.000 francs destiné à aider les associations de production. C’est un don gracieux qui est distribué par très petites sommes, de 500 à 1.000 francs (pour deux ou trois seulement l’allocation s’est élevée à 5.000 francs). C’est donc une espèce d’aumône. Je ne crois pas qu’elle fasse autant de mal que le disent les économistes, mais je ne crois pas non plus qu’elle fasse grand bien. Cette subvention, si modique soit-elle, a pu cependant permettre à quelques pauvres associations de production de se tirer d’un mauvais pas, si fréquent dans les débuts de toute association coopérative, et aussi peut-être de les faire bénéficier de ce prestige qui s’attache en France à toute œuvre subventionnée par l’État. Cette première faveur est de peu d’importance : inutile de s’y arrêter.

§ 2. Privilèges dans les entreprises de travaux publics.

Pour tous les travaux faits par l’État, les municipalités ou les départements, les associations de production jouissent d’un régime de faveur qui consiste en ceci[1] :

1o À obtenir la préférence, à prix égal, sur les entrepreneurs individuels dans les adjudications publiques[2].

  1. Ces faveurs ont été accordées par le décret du 4 juin 1888 en ce qui concerne les travaux commandés par l’État, par l’arrêt du Conseil d’État du 27 juin 1889 pour les travaux des départements, et par la loi du 29 juillet 1893 pour les travaux des municipalités.
  2. Pour comprendre ceci, il faut savoir que tous les travaux commandés par l’État ou les municipalités, etc., doivent être faits par voie d’adjudication publique. C’est-à-dire que l’État évalue provisoirement à un certain prix le montant des travaux à exécuter et invite tous les entrepreneurs qui voudraient les exécuter à dire eux-mêmes (par une lettre sous enveloppe cachetée) à quel prix ils offrent de s’en charger. Les lettres sont ouvertes en séance publique et l’entrepreneur qui a offert le plus fort rabais au-dessous de la mise à prix fixée par l’État, doit être préféré. Si deux entrepreneurs offrent le même prix, il faut recommencer l’opération. Telle est la règle : mais par exception si dans ce dernier cas l’un des deux entrepreneurs est une association de production, c’est celle-ci qui doit être déclarée adjudicataire sans qu’il soit besoin de recommencer cette cérémonie.
    On voit que cette première faveur n’est pas bien grande, car elle suppose un concours de circonstances assez rare. Le cas s’est pourtant présenté, et même récemment dans un cas intéressant, pour une association coopérative d’ouvriers typographes à Nîmes. Le Conseil de préfecture s’est refusé à la déclarer adjudicataire en donnant pour raison que cette association n’était pas uniquement ouvrière puisqu’elle comptait des actionnaires bourgeois. L’affaire est devant le Conseil d’État.