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LES ASSOCIATIONS COOPÉRATIVES DE PRODUCTION

peu de disponibles. Beaucoup vendent au prix de revient, ne font point de bénéfices et ne cherchent pas à grossir le capital social au-delà de « la réserve » imposée par la loi, et dont il leur est interdit d’ailleurs de disposer. La plupart ne demandent même pas à leurs membres de verser le montant total de leurs actions, mais se contentent du versement minimum exigé par la loi qui est de 1/10 (5 fr. par action seulement).

S’il en est qui, néanmoins, deviennent riches et accumulent un certain capital, leur première préoccupation en ce cas est de construire une maison pour y installer leurs magasins : souvent même elles empruntent pour cela. Elles trouvent une certaine satisfaction de fierté à être logée chez elles, et d’ailleurs cela leur fait une bonne réclame. Quant aux fonds appartenant aux associés qui peuvent résulter des dividendes non touchés par ceux-ci et laissés en dépôt dans les caisses de la société — et qui représentent pour les sociétés anglaises des capitaux disponibles de centaines de millions francs — ils n’existent presque pas dans les sociétés de consommation française parce que je répète que beaucoup de celles-ci vendent à prix de revient et par conséquent n’ont que peu de dividendes à distribuer à leurs membres, parce que, même dans les sociétés qui distribuent des dividendes, les membres n’ont guère l’habitude de les laisser en dépôt dans la caisse de la société, et enfin parce que, même les laisseraient-ils en dépôt, les déposants ne souffriraient point qu’ils fussent employés à des entreprises aussi chanceuses que des associations de production. Par conséquent où voulez-vous que les sociétés de consommation trouvent des capitaux disponibles pour commanditer la coopération de production ?

En ce qui concerne les achats de produits, il semblerait que le problème est plus facile. Pourtant il faut remarquer que presque toutes les sociétés de consommation en France ne vendent que de l’épicerie, du pain, du vin, du combustible, du pétrole : quelques-unes, mais seulement les plus importantes, y joignent la mercerie, bonneterie, chaussures et chapeaux. Or les associations de production en France ne produisent rien de tout cela : ce sont des imprimeurs, charpentiers, ébénistes, maçons, tapissiers, peintres en bâtiments, fabricants de voiture, d’instruments de musique, de glaces, de bijoux, de pianos, tailleurs de diamants, etc. etc. Que voulez-vous que les sociétés de consommation leur achètent ? Il y a quelques exceptions. Nous en avons cité une, très remarquable.