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EN FRANCE

rellement auprès d’elles le rôle de tuteurs ou de sœurs aînées, en France les choses se sont passées d’une façon inverse. Ce sont les associations de production qui ont inauguré le mouvement coopératif et les associations de consommation ne sont venues que longtemps après. Non seulement elles n’existaient presque pas en 1848, mais même dans le second mouvement de 1866, elles ne jouèrent qu’un rôle très effacé et à cette date un des leaders de la coopération, Chaudey, écrivait que « la coopération de consommation est la plus médiocre de toutes les formules coopératives ». Ce n’est guère que depuis 1887 que les sociétés de consommation se sont assez rapidement multipliées en France, en partie grâce à l’initiative d’un petit groupe de coopérateurs qu’on désigne parfois sous le nom d’École de Nîmes, parce que ses principaux membres, MM. de Boyve, Fabre, etc., habitent cette ville, dont le signataire de ces lignes est aussi originaire. Ce sont eux qui ont créé pour la première fois, au Congrès de Paris de 1885, une fédération des Sociétés de consommation appelée l’Union coopérative, et ont essayé de l’organiser à l’exemple de l’Union coopérative de Manchester. Mais malgré leurs efforts, les associations de consommation, quoiqu’assez nombreuses, — on évalue leur nombre à 1.500, — sont encore très mal organisées en France : 200 à peine ont adhéré à l’Union ; chacune se gouverne à sa fantaisie et sans programme commun. On comprend que dans ces conditions il ne puisse se produire rien de semblable à ce qu’on appelle en Angleterre le système fédéraliste et qu’elles ne puissent pas être d’une grande utilité aux sociétés de production. D’ailleurs, de leur côté, celles-ci ne sont pas disposées à réclamer l’aide d’associations qui leur paraît représenter un idéal très inférieur au leur. « Pour nous, me disait l’un des présidents d’une association de production, les associations de consommation ne sont que des boutiques d’épiciers ».

On tend cependant aujourd’hui à réagir contre cet antagonisme et à nouer des relations entre les deux formes de l’association coopérative. Dans chaque congrès coopératif qui s’est tenu dans ces dernières années, la question a été mise à l’ordre du jour. Mais il n’est pas facile de trouver des moyens pratiques. Les sociétés de consommation ne sont guère en mesure, même en y mettant de la bonne volonté, de fournir des capitaux aux associations de production, ni de leur garantir des débouchés.

En ce qui concerne les capitaux, d’abord, elles n’en ont que fort