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EN FRANCE

développement dont il la croyait susceptible. Que faire ? Demander ce capital à l’emprunt ne lui paraissait pas un moyen sage, car l’emprunt crée une véritable servitude vis-à-vis du prêteur ; et d’ailleurs il n’était pas probable que le capital offrît son concours avec beaucoup d’empressement et pour un modique intérêt, car les associations coopératives sont considérées généralement par les capitalistes comme offrant peu de sécurité. Donc il lui semblait beaucoup plus avantageux de se procurer le supplément de capital nécessaire sous forme d’actions, puisque sous cette forme le capitaliste renonce à exiger le remboursement de son capital et accepte de courir tous les risques de l’entreprise, et néanmoins il peut être plus facilement tenté par la perspective de participer aux bénéfices et à la direction. Et précisément, il se trouva fort à propos un banquier d’humeur entreprenante, M. Bernhardt, qui lui offrit 700.000 francs en commandite dans ces conditions,

M. Buisson s’empressa de les accepter. En réponse aux critiques qui lui furent adressées (l’exclusion de son association de la Chambre consultative[1] fut même demandée et ne fut repoussée qu’à une faible majorité), il déclara que cette combinaison n’était contraire en rien aux vrais principes coopératifs : qu’elle était au contraire la réalisation de l’association intégrale entre les trois facteurs de la production, travail, capital et talent (de là le nom donné à ce type nouveau), telle qu’elle avait été formulée par Fourier lui-même, et même la part assignée à chacun de ces facteurs par les statuts de l’association nouvelle ne différaient pas beaucoup de celles indiquées par Fourier lui-même (5/12 au travail, 4/12 au capital, 3/12 au talent). Et c’était le seul moyen de donner aux associations de production l’essor qui leur manquait et de leur permettre d’aborder la grande industrie. Sous cette forme seulement, elles pourraient avoir la prétention d’effectuer une transformation sociale.

Quant à la domination du capital dont on se préoccupait, elle ne serait pas à redouter, à la condition de prendre certaines précautions qu’on avait eu soin d’insérer expressément dans les statuts et dont voici les trois principales : 1o les membres du conseil de direction de l’association seraient élus par les actionnaires, mais devraient être pris uniquement parmi les membres ouvriers ; 2o le profit attribué au capital-action ne pourrait jamais dépasser 7 1/2

  1. La Fédération dont nous avons parlé au début.