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s’ouvrirait aux licenciés de toutes les Facultés de droit, sciences et lettres : « C’est là, a dit le ministre, la caractéristique et la nouveauté du projet. »

À l’idée de l’institution d’un troisième doctorat, d’un doctorat économique, dans les Facultés de droit, on peut d’abord opposer des fins de non recevoir qui semblent péremptoires. La première est tirée de l’opinion quasi-unanime des Facultés de droit, qui sont bien, à ce qu’il semble, le corps le plus compétent qu’on puisse consulter sur la question, et qui repoussent le présent qu’on veut leur faire. La deuxième est tirée d’un ordre d’idées plus général : il ne faudrait pourtant pas toujours changer ! Le doctorat en droit a été complètement remanié en 1895 ; l’enseignement économique y a été combiné, à notre avis, très heureusement, avec l’enseignement des sciences politiques ; et, avant même qu’il ait été possible de se faire une idée des résultats de la réforme de 1895, on propose de tout bouleverser !

Nous n’exagérons rien : ce serait un véritable bouleversement dans l’organisation du doctorat. Nous avons maintenant deux doctorats, l’un qualifié ès-sciences juridiques et l’autre ès-sciences politiques et économiques, qui s’équilibrent très bien au point de vue de la difficulté que présente l’obtention du grade : la preuve en est que, du moins à notre connaissance, les aspirants au doctorat se partagent à peu près en nombre égal entre les deux. Et voici que l’on propose d’en prendre un, de le scinder en deux nouveaux et d’instituer, à côté du doctorat juridique, un doctorat politique et un doctorat économique ; ne tombe-t-il pas sous le sens que ces deux doctorats nouveaux ne présenteront pas la difficulté de l’unique doctorat qu’ils remplaceront et qu’on risque à faire déserter le doctorat juridique ? J’entends bien qu’on renforcera par une certaine extension des matières les nouveaux doctorats ; mais quiconque a l’habitude des examens ne s’y trompera pas ; on n’arrivera pas à rétablir l’équilibre et on portera un coup funeste aux études juridiques.

Mais ce n’est pas tout. Le doctorat ès-sciences politiques et économiques a pour but de préparer des administrateurs et des hommes d’État. A-t-on l’intention de les dispenser des études économiques et financières ? Si on dit non et si on exige encore d’eux l’étude si nécessaire de ces sciences, l’équilibre ne sera-t-il pas encore plus manifestement rompu entre les doctorats en droit ?