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la caisse d’épargne postale de vienne

teur de mouvement dans le système des tourbillons de Descartes. Quant à la régularisation des variations lentes de la valeur de la monnaie par la combinaison de la monnaie d’or avec un billon d’argent régulateur, la Banque de virements ne la rendrait que plus simple et plus facile en plaçant à côté l’une de l’autre les deux circulations commerciale et courante, et en permettant ainsi d’ajouter de l’or à la première et du billon d’argent à la seconde en cas de baisse générale des prix, ou d’en retrancher en cas de hausse.

Cette Banque aurait en outre un avantage moral que MM. Solvay et Denis ont signalé à juste titre et qui se résume tout entier dans la substitution au pur salarié du régime actuel, touchant son traitement ou sa paie en argent, les dépensant à l’avance ou les buvant au cabaret, endetté, misérable, du travailleur-capitaliste ayant à tenir un carnet et des comptes, crédité de son salaire et de ses intérêts, débité de son loyer, du prix des produits qu’il consomme, du montant de ses cotisations d’association et d’assurance, employant l’excédent du crédit sur le débit en achats de titres, devenant de plus en plus capitaliste, puis entrepreneur, acquérant l’expérience de la vie et des affaires, fondant une famille, à cent lieues de l’aumône et de la charité, sinon pour la faire à de plus faibles et à de moins heureux que lui, en tout cas pour la recevoir, bref l’homme économique et moral de la société future[1].

Léon Walras.
  1. On trouvera dans l’ouvrage de Jevons, La monnaie et le mécanisme de l’échange, au ch. XXII, la Banque des chèques, le plan d’une institution tendant au même but que la Caisse de Vienne et ma Banque de virements, et, au ch. XXIV, la Banque d’Angleterre et le marché de l’argent, des considérations sur la « sensibilité du marché monétaire anglais » due à l’abus de la monnaie de papier tout à fait propres à confirmer mes vues sur la nécessité d’une large base métallique de la circulation. Jevons montre comment, faute d’une telle base, en 1839, la Banque d’Angleterre « ne fut sauvée de la banqueroute que par l’expédient ignominieux d’un emprunt considérable à la Banque de France ». S’il eût vécu, il aurait vu le même fait se reproduire en 1890.