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THÉORIE DU CRÉDIT

prix trop élevé, de créances douteuses, toutes circonstances ayant amené l’insuccès de l’entrepreneur. On réalise cet actif tant bien que mal, on en retire 50,000 fr., et on distribue ce dividende entre les capitalistes au marc le franc. Chacun d’eux ne retrouve que la moitié de son capital. Quels sont les procédés à employer pour préserver autant que possible les capitaux de ces dangers et inspirer confiance aux capitalistes ? Tel est le problème de l’organisation du crédit[1].

4. Quand on dénombre les éléments de la richesse sociale, on reconnaît qu’à côté des capitaux mobiliers productifs de services producteurs (bâtiments d’exploitation, usines, ateliers, magasins ; arbres et plantes de rapport ; animaux de travail ; machines, instruments, outils), il y a des capitaux mobiliers productifs de services consommables (maisons d’habitation, édifices publics ; arbres, plantes et animaux d’agrément ; meubles, vêtements, objets d’art et de luxe), et qu’à côté des approvisionnements de revenus aux mains des entrepreneurs tels que les matières premières (engrais, semences, métaux, bois à ouvrer, textiles, tissus à confectionner, combustibles industriels), et des capitaux et revenus neufs en vente à l’étalage, il y a des approvisionnements de revenus aux mains des consommateurs et de l’État tels que les objets de consommation (pain, viande, vin, légumes, fruits, huile et bois à brûler)[2]. Ainsi on peut, à la rigueur, se représenter les consommateurs et l’État comme disputant aux entrepreneurs le capital-monnaie des capitalistes. Le prêt de capital à l’État serait le crédit public ; le prêt de capital aux consommateurs serait le crédit à la consommation ; et le prêt de capital aux entrepreneurs serait le crédit à la production. Mais l’économique appliquée ne traite normalement que du dernier, et la raison en est simple. La monnaie prêtée à un entrepreneur sert à acheter de la matière première et des services producteurs qui deviendront un produit neuf lequel se vendra contre de la monnaie. La monnaie prêtée à un consommateur ou à l’État servira à acheter un capital productif de service consommable, ou un objet de consommation, ou un service consommable, et ne pourra se retrouver que par un prélèvement sur des revenus, c’est-à-dire par une épargne future ou par des impôts sur des fermages, des

  1. Je ne donnerai pas ici cette partie, un peu spéciale, de la théorie du crédit. On la trouvera dans mes Études d’économie politique appliquée.
  2. V. Études d’économie politique pure, 18e leçon.